ATON : COMMENT DEVENIR LE MEILLEUR ET VISER L’EXCELLENCE

Aton : Bonjour, je m’appelle Aton. Je suis acteur, auteur et ex-membre du GIGN. Aujourd’hui, je suis sur la chaîne YouTube du disrupteur, Franck Maes.

Franck : Écoutez les amis aujourd’hui, je suis super content parce que je reçois Aton, alias Philippe B. Je vais t’appeler Aton parce que ce sera plus facile. Donc, il est auteur du livre « GIGN, confessions d’un OPS ». Je vous invite vraiment à lire ce bouquin. Vous savez que je lis peu de livres, même si maintenant on commence à me tailler sur les réseaux sociaux parce que chaque fois que je dis ça et je recommande des livres. Mais comme vous pouvez le voir, j’ai pris pas mal de notes. C’est un excellent livre qui se lit très facilement. Je vais venir aussi d’ailleurs sur l’objet en lui-même du livre parce que ça dénote déjà d’une certaine volonté d’excellence.

Je vous recommande le livre d’Aton. Je vous mets le lien bien évidemment juste en dessous pour toutes les personnes qui veulent l’acheter. Ça ne parle pas que du GIGN, mais ça parle aussi de son parcours et c’est très intéressant de jeter un œil dessus. Merci Aton déjà de prendre du temps pour cette interview parce que je sais que tu es assez occupé. Donc merci beaucoup déjà. C’est super sympa.

Aton : Bonjour à toi, bonjour à toute ton audience. Pour moi, c’est un plaisir d’être ici. Merci pour l’honneur que tu me fais de me recevoir et de partager sur ce livre-là, qui est le premier. Il y en a un deuxième. C’est « Féral ». Puis là, on est sur un troisième livre avec Jean-Luc Riva, un roman cette fois. On s’essaie.

Franck : Juste en préambule de cette interview, je m’étais promis de le faire si un jour j’avais Aton sur la chaîne YouTube. Donc, je tiens à remercier Maxime parce que Maxime, c’est un de mes clients qui m’a fait découvrir Aton il y a maintenant un an et demi, deux ans. Je ne sais plus exactement la date. Mais qui m’a dit : « regarde ce mec-là, il a de l’avenir et il est très bon dans ce qu’il fait ». Donc, j’ai commencé à regarder.

Puis aujourd’hui, je suis avec Aton et j’ai lu son livre. Comme quoi, mettez-moi des recommandations, vraiment. Parce qu’on a eu aussi Clara Morgane la semaine dernière et c’était suite à un commentaire d’un spectateur de la chaîne. Donc, si vous avez des idées, et tout ça, de personnes à suivre et des personnes qui pourraient être intéressantes à interviewer sur la chaîne, mettez-le-moi en commentaire. Donc merci beaucoup Maxime. Je pense que quand il va te voir sur la chaîne, il va dire : « mais non ! Aton, sur la chaîne ».

Je souhaitais tout d’abord, avant de commencer vraiment cette interview, parler du livre parce que moi, il y a quelque chose que tout de suite j’ai remarqué dans le livre. Déjà, il y a une surjaquette que j’ai enlevée. C’est tout simplement une facilité de consultation du livre pendant l’interview. Mais j’ai tout lu. J’ai déjà trouvé le livre très bien fait, c’est-à-dire qu’en soi, la photo est belle. Le résumé est beau. La surjaquette est belle. À l’intérieur du livre, ça doit être à peu près au milieu, on a de très belles photos, donc on fera des inserts de superbes photos qui nous permettent de plonger un peu dans l’univers d’Aton. Donc là, on le voit en photo avec Tom Cruise. On voit aussi ce qu’il a fait aujourd’hui, ce qu’il fait aujourd’hui en tant qu’acteur. C’est super intéressant déjà le livre.

Comment tu as fait déjà pour travailler le bouquin ? Est-ce que c’est toi ou est-ce que tu t’es dit : « OK déjà, je veux faire un bel objet ? ». Est-ce que tu as déjà travaillé sur la conception du livre en lui-même ?

Aton : Alors ce qu’il faut savoir, c’est que je n’avais vraiment pas l’idée d’écrire un livre en sortant du GIGN. Je n’avais pas forcément l’envie. Même l’utilité de partager, je ne la ressentais pas. C’est Jean-Luc Riva et François De Saint-Exupéry donc, l’éditeur à Nimrod qui me l’ont proposé. L’idée a fait son chemin. Ils ont réussi à me motiver avec plusieurs arguments, mais aussi sur le fait de moi à 16 ans, est-ce que j’aurais aimé avoir un ouvrage comme ça entre les mains. La réponse était oui, c’est-à-dire un partage sans filtre. Après, sur toute la conception du livre, c’est l’éditeur. C’est Nimrod qui a vu un peu la chose. Ils m’ont demandé des photos.

Ce que je regrette, c’est que tout au long de ma carrière, je n’ai pas fait beaucoup de photos. Il y a toujours le truc, on va faire une photo mytho, photo mytho militaire. Du coup, on ne les fait pas parce qu’on se dira que c’est peut-être un peu abusé de faire. Mais il n’y a pas mal de photos que j’aurais pu prendre, notamment à l’étranger, en Irak. Des choses que j’ai pu voir, où j’aurais pu, alors ce n’est pas me prendre en photo avec un décor, mais il y a des paysages que j’ai en tête et que j’aurais voulu les immortaliser, qui auraient été très bien dans ce livre.

Mais, on a réussi quand même à trouver quelques photos sur tout le long du parcours, assez sympa. Ils ont fait le choix et ils les ont mis dedans. Et c’est vrai que la couverture a été travaillée après avec un photographe, Jean-Baptiste, qui fait pas mal de photos de pub, plutôt d’objets. Tu vois, l’objet c’était moi. On a eu une idée. Et c’est Jean-Luc qui a eu l’idée des deux personnages parce que c’est vrai, dans Aton, il y a plusieurs facettes. Je parle de moi à la troisième personne. Mais là, c’est vraiment sur le produit, sur l’objet pour la jaquette. Il dit : « ce serait bien de mettre deux personnages comme ça ». Donc, on a essayé de faire quelque chose de sympa. Puis le bleu gendarmerie rappelle le GIGN.

Franck : Tout est congruent. Je parle souvent de cohérence sur ma chaîne YouTube et là, tout est cohérent, c’est-à-dire aussi bien le contenant que le contenu et j’y tiens énormément.

Aton : C’est important pour eux et pour moi aussi. Parfois, il y a des projets et j’ai du mal à me lancer dedans parce que je ne vois pas forcément l’intérêt ou du partage et tout ça. Mais une fois que j’ai pris conscience et que je suis convaincu que ça peut servir, je vais être très déterminé à faire les choses le mieux possible. Donc, on a pris le temps. Comme là, pour le roman, ça fait plus d’un an qu’on est dessus, mais on veut vraiment détailler tout pour vraiment rendre un produit qui soit au mieux de ce qu’on puisse faire et qu’on n’ait surtout pas de regrets.

Franck : Si tu veux bien, j’ai fait cette interview un peu différemment, c’est-à-dire que j’ai pris des photos. En fait, je vais te donner la photo, si tu le veux bien. J’espère que tu ne vas pas dire non parce que toute mon interview dépend de ça. Je vais te donner la photo au début de la question et je vais juste tout simplement te poser la question. Qu’est-ce que ça t’évoque cette photo ? Ensuite, je te poserais la question, si tu le veux bien.

Aton : D’accord et avec plaisir.

Franck : On va commencer tout de suite par la première photo. Qu’est-ce que tu en penses ? On va te donner cette photo-là.

Aton : Je pense qu’elle est montrée. Léonidas, 300, le film 300. Ça me rappelle un peu moins le GIGN. Les 300, alors il faut savoir, quand je suis rentré, on n’était pas à 300, on était à peu près entre 40, 50 opérationnels et pareil à la logistique, donc ça faisait un GIGN à peu près à 80 personnels, mais il y avait vraiment cette mentalité un peu des 300.

Alors, je ne dis pas que cette mentalité n’est plus au GIGN. Alors maintenant, ils sont 300 avec toutes les forces. Mais à l’époque, ça se ressentait davantage. Là, les esprits les plus forts sont un peu noyés dans une masse. En même temps, il fallait recruter. Il faut du monde pour répondre à la menace actuelle. Mais c’est vrai qu’à l’époque, c’était vraiment ça. D’ailleurs, je l’ai tatoué parce que je l’ai dans le dos. J’ai une espèce de spartiates avec le casque 300 et avec exactement le même couteau. Les couteaux seront très présents dans ma vie. C’est un objet qui me parle beaucoup et le film représente bien l’idée que j’ai de la qualité face parfois à la quantité. Selon où on place la qualité, elle peut vraiment démonter la quantité et avoir le dessus. C’est toujours la recherche d’excellence donc, ce film me parle beaucoup.

Franck : C’est intéressant que tu parles d’excellence. Parce que moi, si je veux vraiment, comment dire, si je voulais vraiment t’avoir sur la chaîne, c’est pour parler d’excellence. C’est vraiment sur la qualité et l’excellence qu’on va axer cette interview. Pour rebondir sur la photo de Leonidas dans 300, c’est parce qu’en fait, si tu veux dans ton livre à plusieurs passages, il y a des références aux Spartiates. Il y a plusieurs moments dans le livre tu en parles non seulement de ton père qui te parle de l’esprit spartiate très jeune, donc plus l’examen au GIGN aussi, où tu en parles également, quand tu réfléchis à ton entraînement aussi tu en parles. En quoi la philosophie spartiate t’inspire justement ?

Aton : En fait, pour mon père et pas seulement mon père, mais pour les Spartiates, c’est vrai que tout se joue très jeune. Les valeurs doivent être acquises très jeunes et j’en suis convaincu. Même avec mes enfants, c’est vrai que de 0 à 6 ans, même un petit peu plus, j’essayais vraiment de leur parler. Pas comme à des adultes, mais presque, c’est-à-dire de les responsabiliser à leur niveau sur certaines choses et de leur dire les conséquences de leurs actes. C’est-à-dire que quand ils étaient injustes envers un autre camarade, je ne dis pas que ce n’est pas grave parce qu’il n’y a pas eu de conséquences. Par exemple, ils vont gifler un camarade, si c’est injuste, non. Non, c’est grave. D’ailleurs, on voit très bien qu’il y a beaucoup d’adultes qui ne sont pas en paix avec eux-mêmes parce qu’ils ont des traumatismes qui datent de cette période-là, de 0 à 6 ans. Donc, on voit l’importance de donner un cadre très tôt et avec des références assez imposantes, faire des piliers, créer des piliers de référence très tôt parce que le futur adulte va s’appuyer sur ces piliers-là. Si, en fait, on crée un monde imaginaire à un enfant de Bisounours de ceci ou de cela, il va prendre une claque un peu plus tard et ça peut créer même des traumatismes bien plus tard et ces références sont plutôt sableuses. Ça, ce n’est pas bon.

Franck : L’esprit spartiate. Si vous n’avez pas vu le film 300…

Aton : Mon père ne m’a pas trop ménagé justement avec ça. Ça a été dur. Je lui ai dit, je lui dis : « ça aurait pu virer différemment ». Il se trouve que les choses se sont bien goupillées et ça a fait ce que je suis. Aujourd’hui, il est plutôt satisfait du résultat. Il a du mal à dire qu’il est fier. Il l’a dit quand j’ai reçu la Légion d’honneur, mais il a du mal. Mais en même temps, c’était sa vision et j’ai sensiblement la même. Après, il y a des choses que je n’ai pas forcément répétées sur mes enfants. Il y a eu peut-être une écoute un peu différente, mais après, chacun fait du mieux qu’il peut avec ce qu’il a. Mais c’est vrai que l’esprit spartiate était important pour moi.

Franck : Je vais te donner cette photo-là aussi. Regarde cette photo-là puis je te laisse me dire à quoi ça te fait penser cette photo.

Aton : Alors, ça fait penser à l’enfance. Si l’enfance est à revivre, je n’aimerais pas la revivre. Alors, non pas que je n’ai pas eu une enfance heureuse, ce n’est pas ça. Ça peut paraître paradoxal par rapport à ce que j’ai dit avant, mais mon père mettait la barre assez haute dans beaucoup de domaines et ce qui fait que parfois, c’était un peu dur à vivre. Je fais de la gymnastique et il fallait que je sois le trois premier. Mon père venait au cours, il fallait que je batte des records quoi que je sois, que je fasse des choses extraordinaires. Je me mets à la musique, il fallait que je sois un virtuose. Et là, je pose pour la photo. Il me met la guitare entre les mains. Je n’ai pas forcément envie. À cet âge-là, je n’avais pas forcément envie d’être pris en photo. La guitare est grande, mais il fallait que je joue un vrai morceau. Ce n’était pas une guitare qu’on mettait dans la main d’un enfant juste pour rigoler. Mon père, il mettait la guitare et il fallait que je joue, mais que je joue des vrais morceaux. Donc, je prenais des cours au conservatoire de Saintes, qui était très élitiste, et même à un moment donné le prof a dit à mon père : « je ne sais pas pourquoi il vient et je crois que lui non plus. Je crois qu’il veut faire autre chose pour votre fils ». J’ai pris d’autres voies. Après, je me suis orienté vers les sports de combat qui étaient beaucoup plus en adéquation avec la personne que j’étais et que j’avais envie d’être. Mais la musique, par contre, j’ai toujours été très à l’écoute, très intéressée par la musique et j’en écoute beaucoup. Mais moi, après, on ne peut pas avoir tous les talents dans une vie.

Franck : Tu n’es pas un bon musicien.

Aton : J’aime la musique, mais là, on voulait me faire de moi un guitariste et je crois que là, c’est l’échec. Je ne serai jamais, il ne faut pas dire jamais, mais ça n’a pas été une grande réussite.

Franck : Je vais compléter ce que tu viens de dire parce que c’était le début de ma question, parce que tu le dis dans ton livre. Tu dis que quand ton père t’inscrit au conservatoire, le professeur, tu diras : « je me demande pourquoi votre fils vient ici, lui-même, il ne sait pas pourquoi ». Donc, très tôt, on voit que tu as du mal à rentrer dans le cadre. Ça, on le voit à plusieurs reprises dans le livre et on voit que tu as du mal à être dans le moule. Plusieurs fois dans le livre d’ailleurs, tu transgresses les règles, à plusieurs parcours. Pour en savoir plus vraiment, allez le voir dans le livre parce que je ne vais pas vraiment toutes les citer, parce qu’il y en a vraiment pas mal. Je me souviens d’un moment aussi où je crois que tu étais en caserne de gendarmerie et tu étais, comment on appelle ça, excuse-moi si je me trompe dans les termes, mais peut-être tu menais la garde et il y a un mec qui est venu un peu te chauffer et que tu l’as attrapé. En fait, tu n’avais pas le droit, mais que le mec te chauffait trop et tu l’avais quand même attrapé.

Aton : Je l’ai poursuivi dans la rue avec un mat-49 à l’époque. C’est un pistolet mitrailleur qui était chargé. Il a eu très peur. Mais en même temps, il m’avait insulté. Moi, j’avais dit à la rigueur, passons, mais insulter le drapeau français, il y avait un drapeau français, c’était le soir, mais il y avait le mât des couleurs et il y avait l’institution. On m’avait prévenu que des gens venaient et on m’avait dit qu’il fallait laisser faire et c’est inconcevable.

Franck : Plusieurs fois, tu as transgressé les règles. Parce que d’un autre côté, ce qui est paradoxal dans le livre, c’est qu’on sent que tu transgresses régulièrement. Mais d’un autre côté, tu vas dans un endroit où c’est bardé de règles. Comment faire pour faire en sorte de respecter les règles ? Parce que c’est important de les respecter, les règles. Il y a beaucoup de règles. Mais aussi de les contredire lorsqu’on sent qu’elles ne sont pas appropriées. C’est un peu le cas de cet enfant avec la guitare.

Aton : Là, on voulait me faire entrer dans le cadre. Ma mère voulait que je fasse ceci, que je fasse ça. Mon père aussi. Très jeune, j’avais envie de vivre ma vie. Et quelque part, le discours de mon père, le discours théorique des spartiates d’être un homme, de pouvoir faire ses choix, d’assumer ses choix, là, ce n’étaient pas les miens, c’étaient les siens. Après, transgresser les règles, je crois que je l’ai toujours fait et je crois que je le ferai toujours. Il n’y a pas si longtemps que ça, il y a des choses que je ne peux pas raconter comme ça. Je te disais tout à l’heure, hier quelqu’un qui m’insulte sur les réseaux sociaux, passe encore. Des haters, j’en ai plein. On peut mettre ça sur le compte de la jalousie ou n’être pas à son goût. À la rigueur, je m’en fous complet. Par contre, les menaces, qu’on me menace sur les réseaux sociaux ou physiquement, là, ça ne passe pas. C’est vrai qu’hier, j’ai donné rendez-vous à un abonné qui n’est pas venu. Ça, c’est hors cadre, je ne devrais pas le faire.

Franck : Comment tu fais pour le sentir, quand tu dois sortir et quand tu dois te conformer ?

Aton : Ce que j’essaie de faire, c’est de faire un peu comme en gestion de crise. C’est-à-dire, j’émets l’hypothèse de dévier et j’essaie d’évaluer les conséquences que ça a, alors sur moi, sur autrui et tout ça. Quand les conséquences ne sont que sur moi et un petit peu sur autrui, mais que c’est calculé, que c’est sur ma famille et que je peux gérer et que moi vivre avec ce que je dois endurer si je dois accepter les règles, c’est trop fort pour moi, je les transgresse. Par contre, une chose est sûre, c’est que j’accepte la sanction. Je prends la responsabilité de mes actes. Je roule à 250 sur l’autoroute, je me fais arrêter parce que j’estime que je dois l’être. Le temps de trajet est trop long et le temps est trop court donc, j’axe sur la vitesse, je prends mes responsabilités. Je dis, surtout, il ne faut pas le faire, mais si je le fais, ça reste dans une certaine maîtrise parce que j’ai été formé aussi. Il y a un passé. Il y a un passé à tout ça. Quand je fais les choses, c’est que je me sens capable de les faire et de les assumer surtout. Donc oui, j’ai transgressé les règles et je pense que je suis allé aussi vers le GIGN, vers l’armée, parce que justement, on allait me cadrer un peu. Si je n’étais pas rentré dans le GIGN, je pense que j’aurais une autre carrière, mais face au GIGN. Les règles sont plus d’un point de vue moral, éthique plutôt que le code de procédure pénale ou le code pénal. Ou la loi en elle-même parfois, j’ai du mal avec certaines lois. Mais après, c’est comme tout, il faut savoir faire avec, les accepter parfois. Quand on transgresse, assumez et payez.

Franck : C’est très intéressant parce que souvent, je dis aux gens méfiez-vous de ne pas être trop dans le cadre et d’un autre côté, de ne pas trop transgresser le cadre. Mais c’est un curseur qui est quand même très difficile.

Aton : C’est très fin. Alors, ça paraît prétentieux de dire ça, l’intelligence, mais c’est l’intelligence de chacun, c’est de faire des choix. La vie est faite de choix, de toute façon. Puis, si je ne me plais pas ici, je vais ailleurs.

Franck : Tu m’excuseras, mais j’ai noté beaucoup de choses sur ton livre. Pour être honnête, j’ai dû enlever quelques passages que je voulais mettre dans l’interview parce que sinon, on aurait fait une interview de cinq heures.

Aton : J’en ai fait une. L’une de mes premières interviews a duré cinq heures.

Franck : Je te rassure, on va faire plus court. J’ai noté quelques passages et je voudrais t’en parler. Dans le livre, tu dis, je vais lire le passage du livre.

« Mon père n’était pas un tendre à la maison. Rien ne se faisait dans la facilité. Mais cette éducation à la dure m’a rendu les difficultés de la vie plus acceptable. Et surtout, elle m’a donné les moyens de les surmonter. »

En quoi la difficulté forge l’excellence ?

Aton : En fait, quand je parle de ce moment-là, ce que j’ai en tête, ce sont les moments où j’étais seul dans ma chambre face au constat d’échec que faisait mon père sur des choses que je pouvais faire. C’est-à-dire j’avais une mauvaise note, j’avais un résultat sportif qui était décevant à ses yeux, il n’était pas tendre. Il me disait : « le résultat est nul ». Ça ne veut pas dire que tu es nul. Tu as été nul à ce moment-là, mais maintenant, vas dans ta chambre et pose-toi les bonnes questions. C’est vrai qu’il y a eu beaucoup de moments de solitude dans ma chambre, où je me posais énormément de questions et je remettais tout en cause et tout en question et surtout moi-même. Ce n’était jamais la faute des autres. Quand je revenais sur un échec, j’avais joué au tennis où j’avais une mauvaise note, ce n’était jamais la faute du prof. Ce n’était jamais la faute du mec qui a été en face de moi.

Franck : C’était ton raisonnement ou c’était le raisonnement de ton père ?

Aton : Le raisonnement de mon père, mais c’était aussi le mien. C’est-à-dire que même si l’environnement n’était pas favorable, comment j’aurais pu faire pour rendre les choses meilleures et à mon avantage. Si le résultat est ce qu’il est, c’est que j’ai ma part de responsabilité et quelle est-elle ?

En fait, c’est très jeune, donc c’était très dur. Parce qu’à 6 / 7 ans, quand on est seul dans sa chambre à s’être fait engueuler par son père parce qu’on n’a pas gagné un match de tennis ou à la gymnastique, on a fait comme tout le monde, mais du coup, on a donné 10 à tout le monde, mais que moi, je ne suis pas sorti du lot. Ce que j’ai fait, c’est très moyen. Mon père me disait c’est très moyen. Tu es moyen, tu es dans la masse. C’est quoi tes rêves ? Et moi, tout petit, je disais je veux être acteur à Hollywood. Je dis bien : « eux, ce n’est pas la masse », et ils sont sortis là tout de suite. Alors, ce n’est pas une mise en compétition entre l’élite et la masse ou machin, mais à un moment donné, quand on veut quelque chose, quand on a de l’ambition, il faut savoir se démarquer, sortir du lot. Et ça, c’est par le travail et la remise en question et ne jamais remettre la faute ou son échec sur les autres. Donc, en fait, à chaque fois, je cherchais ma part de responsabilité, je me remettais en question. Donc, c’est très dur. Il y a eu beaucoup de pleurs. J’ai souvent pleuré, moi seul dans ma chambre, à me remettre en question.

Et quand je sortais de ma chambre, quand j’ouvrais cette porte, il y avait la détermination de faire mieux et j’avais compris mon échec et comment j’allais faire pour faire mieux. Donc, quand je sortais et que je retournais, non pas au combat, mais la vie était un combat. Parfois, quand j’y retournais, je savais et ça marchait.

Quand je suis arrivé au GIGN, que j’ai fait le pré-stage, qu’est-ce que j’avais fait avant pré-stage ? J’avais fait l’armée. J’ai fait deux ans d’armée chez les paras… disciplinaires. J’avais dormi dehors dans ma vie où c’était compliqué. Je suis parti très tôt de chez mes parents. J’avais fait un tour d’Europe en stop. Je suis allé à Moscou. J’avais déjà eu un flingue braqué sur la tête. On m’avait déjà tiré dessus parce que j’ai travaillé en boîte de nuit. Je m’étais battu plusieurs fois.

Les tests GIGN, ils sont durs, mais ils ont été rendus moins durs pour moi. Parce que j’avais ce passé-là et parce que je savais qu’on se prépare à tout. Moi travaillé en boîte de nuit, certains me disaient : « je ne vois pas l’utilité ». Moi, je peux vous assurer que les quatre années que j’ai fait, pas à temps complet, mais toutes les nuits que j’ai passées devant une porte de boîte de nuit à gérer mon stress, à gérer ma rage parfois de répondre à certains par l’usage de la force. Ça m’a beaucoup appris dans ma maîtrise pour le GIGN et pour la gendarmerie,

Franck : Donc, la difficulté, c’est aussi ce qui t’a permis d’arriver à une certaine forme d’excellence.

Aton : Ça m’a permis de me confronter. De toute façon, je suis convaincu qu’en allant se confronter à la difficulté qu’on arrive à monter le curseur de ses capacités. Plus on monte le curseur, plus on tend vers l’excellence. C’est toujours la même chose. C’est par le travail et l’expérience qu’on arrive à gagner un niveau. Celui qui ne fait que de la théorie, qui est dans son salon, qui ne va regarder que des tutos YouTube… J’ai regardé les tutos YouTube, ça marche. Mais quand je vais dans ma salle de bain pour refaire les réparations que j’ai vues, qui étaient très facile pour le professionnel, mais ce mec-là, s’il est professionnel et qu’il fait des tutos, c’est qu’il a un niveau. Donc le tuto, c’est bien, mais la pratique, je vais en apprendre davantage. Donc voilà, c’est toujours confronter la lecture de certains ouvrages et de certains philosophes même et puis, la mise en application dans la vie. Tout ça fait que ça se rejoint parfois ou parfois pas du tout, mais ça fait notre propre expérience et notre propre savoir.

Franck : Il y a plusieurs passages du livre qui m’ont marqué, concernant la sélection drastique, je dis bien drastique du GIGN, qui représente la crème de la crème. Tu le dis à plusieurs passages la crème de la crème dans le livre et j’ai pris un passage dans le livre qui m’a bien parlé.

« Il y a une graduation à la motivation et chacun doit connaître son propre curseur. » Ça rejoint un peu ce qu’on a dit là. « Le GIGN est une machine à trier impitoyable et peu nombreux sont ceux qui traversent les filtres. Ceux-là constituent l’élite. »

Qu’est-ce que tu penses de cette sélection à l’extrême ? Pourquoi l’excellence, elle ne peut être produite à la chaîne ? Parce qu’il y a une sélection. Ce qui veut dire sélection veut dire qu’à la fin, il n’en restera quand même beaucoup moins qu’à l’entrée.

Aton : À l’époque, en 2003, j’ai passé le test en septembre 2003. Le pourcentage, c’était moins de 10 %. Moins de 10 % qui réussissaient entre les 100 qui se présentaient aux sélections et ceux en sortaient, c’était du 6, 7 % et encore et encore.

Pour moi, c’est l’excellence au GIGN. Attention ! Le GIGN n’est pas l’excellence de la gendarmerie. Le GIGN est l’excellence de l’intervention. Pour l’intervention, ça nécessite d’avoir des hommes qui ont un certain nombre de qualités et un niveau dans différentes disciplines et domaines. En fait, on est évalué par rapport à ces choses bien précises. C’est-à-dire que ceux qui font de la moto, les motards de la gendarmerie sont l’excellence dans la conduite moto. Nous, au niveau de l’intervention, c’est vrai qu’il y avait un certain panel de choses, un savoir-faire. Il y avait du savoir-être, il y avait du savoir-faire. Tout ça est testé à l’extrême. Ce qui fait que si on n’a pas le niveau, on rentre chez soi. Et sincèrement, moi, je pense que oui, c’est dur, alors j’ai des camarades qui ont échoué, qui auraient peut-être à d’autres moments de leur vie, parce qu’en la vie n’est pas un long fleuve tranquille. Il y a des moments où on est capable et il y a des moments où on n’est pas capable. Puis rien n’est figé. Donc, ceux qui échouent en 2000 peuvent réussir en 2002 et puis foirer en 2003. Il fallait présenter en 2002 si c’était le bon timing. Donc, en fait, il y a une question de timing, de qualités à avoir. Et ça, en fait, c’est l’intelligence de situation. C’est dire, si je les présente en 2001, je ne suis pas prêt. Parce que physiquement, je ne suis pas prêt. L’expérience, le savoir-être, je l’ai. Ça, ce sont des choses qu’il fallait avoir. Le sens collectif, le sens de l’engagement, certaines valeurs, si on ne les a pas, on est très vite démasqué sur les tests. Et là, c’est rédhibitoire. C’est terminé.

Maintenant, les capacités physiques, ça se travaille. En 2001, j’étais bon, mais il fallait être très bon, voire excellent. Donc, je n’étais pas prêt. En 2002, j’étais presque prêt, mais au niveau timing, ça ne faisait pas. Je n’avais pas l’âge. En 2003, le timing était parfait. À moi d’être là au rendez-vous et de faire les choses. J’ai réussi à passer. Ça fait que je me suis retrouvé parmi l’élite. Alors aujourd’hui, c’est vrai qu’avec le politiquement correct, il ne faut pas dire, ce n’est pas humble de dire : « je fais partie ». Mais ici, c’est une fierté. Pour moi, ça a été une fierté d’avoir été au rendez-vous et d’avoir fait partie de l’élite. Chose que tout le monde ne peut pas accéder. C’est un luxe.

L’excellence est un luxe.

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On se donne les moyens comme on va se donner les moyens pour acheter dans le domaine du luxe. Un sac Louis Vuitton, ça coûte cher. Une montre Patek Philippe, ça coûte cher. Quand on veut se l’acheter, il faut travailler pour faire de l’argent. Et avec cet argent, on va acheter. En fin de compte pour entrer au GIGN, il y a un travail à fournir. On n’achète pas sa place là par contre, mais on travaille. Quand on a réussi à faire un bon travail, ça passe.

Après, il y a aussi le facteur chance sur les blessures. J’ai vu des gars qui se sont blessés, mais au presque dernier moment, une blessure qui faisait que c’était terminé pour eux. Là, c’est regrettable, mais ça fait partie de la sélection. C’est comme ça. On a ouvert un peu les vannes, je vais dire après, vers 2007. De 2007 et ensuite là actuellement avec le GIGN 3.0. Parce qu’en fait, il y a une telle menace en France avec le terrorisme. Ça, on le savait. En 2003, on savait très bien ce qui allait se passer en 2015, on n’est pas naïfs. On avait observé ce qui se passe à l’étranger. On connaissait les modes opératoires, on savait que ça allait arriver, on s’y est préparé. Maintenant, on ne peut pas tout stopper, on fait notre maximum. Toutes les unités en France font leur maximum, mais il faut un certain niveau, mais il faut aussi un certain nombre de personnels. À moment donné, en 2003, on s’est rendu compte et c’est pour ça qu’il y a le reportage des racines et des ailes, c’était pour humaniser un peu les tests parce qu’il y avait des gens qui disaient : « moi, je ne me présente pas, c’est surhumain ». Alors, ce n’est pas surhumain, mais c’est très bon. Oui effectivement, ça demande beaucoup de travail et beaucoup d’entraînement. Et c’est vrai qu’il a fallu recruter donc, on a baissé un peu ce niveau, exigence physique.

Franck : C’était quelle année qu’ils ont baissé ?

Aton : En 2007, à peu près après 2007. C’est-à-dire que comme il fallait un peu plus de monde, on s’est rendu compte que si on restait sur les mêmes exigences, on restait à moins de 10 %, à 5, 6 %. Et là, il faudrait beaucoup de temps, puis il y avait des départs en retraite. C’est très dur. À un moment donné, on a été même en sous-effectif, mais très longtemps on a été en sous-effectif, ce qui fait qu’on avait un rythme très soutenu. Rythme très soutenu qui dit fatigue, dit fatigue dit blessure et dit encore sous-effectif. À un moment donné, il faut pallier à ça. Donc, il faut travailler.

En 2007, la question était alors là, c’est vraiment du off, si je puis dire. C’est un scoop. Parce qu’on nous a réunis dans une salle de réunion et on n’était pas nombreux, on était une quarantaine les opérationnels. Et là, le patron qui était Frédéric Gallois à l’époque nous dit, c’était en 2005, il dit : « il va falloir recruter ». Donc, le niveau, on va peut-être être un petit peu moins regardant sur certaines choses. Alors nous, déjà, on avait les boules parce que nous, on se dit : « nous, on nous a demandé ça. Les mecs qui vont arriver derrière, on va leur demander moins. Ils n’ont pas le même stage, ils n’ont pas la même formation. Ce n’est pas les mêmes guerriers ». Mais en fait l’un dans l’autre, on retrouve toujours à peu près ce même noyau dur. Après, il y en a un peu moins bon.  Au GIGN, tout le monde n’a pas la première place dans les missions. Il faut être très clair là-dessus. Il y a des gens qui sont très bons et il y en a qui sont excellents, qui seront plus sollicités que les autres.

Franck : C’est-à-dire qu’il y a des gens très bons chez l’élite et il y a des gens excellents chez l’élite. Donc, ils sont excellents d’excellent.

Aton : Ce sont des gens qui s’entretiennent et puis dans la durée. Alors parfois, ils sont excellents pendant trois, quatre ans et après ils fatiguent parce qu’on est humain. Il faut se dire que c’est de l’humain. Puis il y a de très bons qui ont un jour une prise de conscience sur une mission et qui deviennent excellents. C’est ça, en fait. Puis, ça dépend du commandement, du management. Ça dépend de tout ça aussi. Mais là, en fait, on ne pose la question, il va falloir grossir les effectifs. Donc le GIGN, il va falloir passer de 80 tout dans son ensemble, les 40 opérationnels et les 40 logistiques, à 300, 400. Il y en a même qui a dit, je me souviens de Fred, il dit : « mais en fait dans l’aquarium-là, il y a les requins, nous, et vous allez mettre des truites ». Il dit : « ça ne va pas le faire ». On a tous rigolé. Il a dit : « avec qui on va travailler ? »

Alors, il nous a proposés à l’époque, on nous a proposé les idées, les forces spéciales. Parce que s’il y a un gros problème de terrorisme en France, avec les forces spéciales, est-ce que ça peut le faire. On dit : « eux, ils sont habitués à travailler à l’étranger, c’est-à-dire que leurs appuis de feux sont très lourds. C’est la doucette, la grosse mitrailleuse, le chirurgicale. Ce n’est peut-être pas comme nous, on fait. Ce n’est peut-être pas leurs capacités. Il va falloir réformer à intégrer colonne d’assaut et travailler avec nous, pourquoi pas. Au niveau état d’esprit, ça pouvait le faire. »

Ensuite, on nous a dit sinon les unités polices, le raid. À l’époque alors là, non jamais avec le raid. On n’est pas formé pareil, on n’est pas recruté pareil. Ce n’est pas possible. Ça ne va pas le faire. Moi, j’ai été assez virulent à une époque contre la police, même j’étais un jeune con, je ne le savais pas. Je faisais que crier comme tout le monde. Après avec du recul, j’ai appris à connaître certaines personnes du raid. En fin de compte, ils ont leurs modes de fonctionnement, mais les gars sont très bons et il n’y a pas de comparaison. Je ne peux pas comparer parce que je n’ai jamais été au raid, je n’ai jamais été dans la colonne d’assaut du raid. Moi, je me garde bien de juger une intervention du raid qui est filmé. Je peux avoir mon avis sur ce que je vois. Mais à mon avis, il est sur quoi ? Il est sur ça, sur une vidéo. Donc, je laisse au raid leurs débriefings et tout ça. Mais à l’époque, j’étais contre. À l’époque, j’étais non, pas le raid. Après, on nous dit l’EPIGN. L’EPIGN est la FSP maintenant. Ce sont ceux qui font la protection rapprochée dans les ambassades sensibles. À l’époque, EPIGN, GIGN, c’était pareil, une guerre. Il faut savoir, c’est de l’ego tout ça. C’est de la pignolade.

Franck : Alors que c’est quand même tous des forces d’excellence.

Aton : Mais bien sûr, mais bien sûr, mais ça on l’apprend après à observer, quand on observe. Puis, il faut aller se mouiller. Moi, je suis allant en Irak, je suis allé en Libye, je suis allé en Guinée avec eux donc, j’ai appris à connaître. Le métier est différent. Le métier en fait, c’est le danger qui vient à 360 degrés de l’extérieur vers l’intérieur, vers eux. C’est ça la protection rapprochée. Nous, c’était, on est le 360 et on va vers la crise. C’est différent, donc il y a un état d’esprit qui est un peu différent. Mais le guerrier, il est à peu près sensiblement le même. En fait, moi à l’époque, j’étais contre et je leur ai dit d’ailleurs après. Moi, je voulais qu’on reste les 300 face au monde. On était nombreux à ça, à vouloir ça, à rester que ce petit noyau dur. Puis, on nous a imposé la restructuration avec l’EPIGN, le GSPR. On a juste modifié les lettres qui étaient GSIGN en GIGN. C’était plus porteur. On nous a demandé de travailler sur l’écusson. C’était une fumisterie parce qu’on savait très bien qu’il allait rester le même. Il était connu dans le monde entier et on a rajouté en gros GIGN, les quatre lettres. En fait, il a fallu faire avec ça.

Il y avait plusieurs possibilités. Il y avait soit le choix de rester et auquel cas il fallait apprendre à travailler ensemble et ne pas pester tous les jours à râler. Parce qu’on ne va pas au GIGN en râlant le matin, ce n’est pas possible. C’est un travail passion. Ou alors c’était resté et faire avec ou partir. Certains ont fait le choix de partir. Très dure. Quitter le GIGN comme ça, c’est très dur. Parce que dans le milieu civil, c’est difficile de retrouver la même sensibilité au niveau collègue, au niveau de la hiérarchie, enfin tout un tas de choses et puis les missions. On ne sait pas avec qui on travaille.

Moi, j’ai décidé de rester. J’étais un jeune donc, j’ai décidé de rester et il y a eu des passerelles sur des missions qu’on a pu faire. Là, j’ai pu aller travailler en Irak et je le dis dans le livre à moment donné, l’ambiance est un peu froide. J’étais le seul GIGN au milieu d’EPIGN. À un moment donné vient la discussion sur qu’est-ce que tu disais de nous à l’époque. Moi, je vais vous dire franchement les gars, je vais vous dire sincèrement ce que vous étiez, vous étiez des GIGN ratés, c’est-à-dire des mecs qui ont passé les tests GIGN, vous avez foiré et c’est l’EPIGN qui vous a ouvert les portes. Quand vous êtes en boîte de nuit, vous annoncez que vous êtes GIGN, une certaine partie du GIGN parce que c’est plus parlant. Ils me disent : « tu as dit ça ? » Je dis : « ouais », et je le pensais. Parce que certains anciens qui avaient une certaine aura me disaient ça et je le croyais. Là, aujourd’hui, j’ai vu comment vous travaillez.

Quand on est sorti de l’aéroport pour aller jusqu’à l’ambassade, je me suis chié dessus dans la voiture. Vous, vous étiez bien. Moi, je n’étais pas bien. J’ai pris conscience de votre travail, de la difficulté. Puis, il y avait pas mal de petites choses, des événements qui ne sont pas cités dans le livre, parce qu’il aurait fallu encore plus de pages, mais où j’ai vu les réactions des mecs et où j’ai été pris par le stress. Eux, en fait, ils géraient très bien le stress. Il y a eu des explosions. Il y a une explosion un jour, ça a pété juste à côté de l’ambassade. Moi, je suis sorti avec mon 416, un peu paniqué, submergé d’émotions et de stress. Je pouvais le gérer et j’étais en train de le gérer. Eux, ils étaient très bien.

J’ai dit les mecs, ils sont bons. On a eu cette discussion et je dis mon regard aujourd’hui, mon regard a changé sur vous. Mais au début, j’étais un jeune con et je vous voyais, même pas une concurrence, vous étiez en dessous. Puis à Marignane, vous n’étiez pas dans l’avion, vous étiez en dessous à récupérer et à passer les chargeurs. Donc, voilà l’image. Mais tout ça, c’est de la branlette. Les mecs ont un très bon niveau et ils avaient le niveau pour. Alors avec une formation, bien sûr, parce que le travail d’intervention est différent du travail de protection rapprochée. Moi, aujourd’hui, je suis retraité, je peux faire de la protection rapprochée parce que j’ai été formé par l’EPIGN, la FSP et j’ai fait des missions avec eux.

Mais moi, ce que j’avais remarqué c’est que beaucoup d’anciens GIGN faisaient de la protection rapprochée sans avoir et en ayant même craché sur la protection rapprochée. Je ne trouve pas ça bien. Puis ceux qui estiment, la protection rapprochée, qui peuvent faire des interventions sans avoir de formation, c’est pareil. Donc non, ce sont des contextes qui sont différents, mais qui sont compatibles à condition de s’entendre, de se coordonner et de travailler. Et, ça a nécessité plusieurs années de travail commun et ça a été mis en place par Denis Favier en 2007 – 2008. Il a fallu des années. Et là, ça commence presque tout juste à bien marcher, à bien fonctionner.

Et là, maintenant, on amène une autre composante, c’est le GIGN 3.0 avec les antennes. Donc, c’est un travail de passionné. C’est un travail très dur où il faut mettre absolument son ego de côté. Ça, c’est très compliqué parce qu’en fait, on arrive à quelque chose qui est extraordinaire de rentrer au GIGN. La première année, l’ego, il est tenu. Il est tenu au niveau zéro parce qu’en fait, les anciens font en sorte que tu es nouveau, tu es un bitos. Tu n’as pas à la ramener.

Par contre, quand on a deux, trois ans, quatre ans de GIGN, on a commencé à faire quelques missions, puis on commence à sentir un peu important et c’est là qu’il est le danger. C’est que ces mecs, je dis ces mecs, on a l’impression que je généralise, mais quand même, j’en ai fait partie, quand on a le melon comme ça et qu’à moment donné, ils s’entraînent, ils sont bons, ils sont très bons, voire excellents, mais attention, là c’est dangereux. Puis, il y a l’expérience qui fait qu’on redescend et après, on fait sa carrière, on fait du mieux qu’on peut, mais on ne changera pas le monde.

Franck : Merci pour la précision de la réponse. Dans le livre aussi, tu écris à un moment, j’ai relevé ce passage-là qui est très intéressant.

« On pourrait croire que nous sommes des trompes la mort, mais c’est loin d’être le cas. Nous sommes avant tout des professionnels qui enchaînons les sauts dans toutes les conditions. »

Alors le GIGN, ils s’entraînent beaucoup, on peut le voir dans le livre. Puis, on peut le voir aussi de l’image de marque qui ressort du GIGN, de ce qu’on peut voir en tant que simple civil. Quand on me parle du GIGN, c’est effectivement, je voyais des surhommes. Après, quand j’ai lu ton livre, j’ai vu que ce n’était pas des surhommes quand même. Ce sont des super-hommes, des surhommes, je ne sais pas.

Ils passent leur temps à répéter, à se préparer, à se renseigner aussi avant chaque mission, donc ce qui se passe avant la mission, ce qu’on ne voit pas, ce qui est peu visible. En quoi tous ces détails répétés contribuent au succès d’une mission ?

Aton : Alors, ce qu’il faut savoir, c’est que si on s’entraîne beaucoup, c’est pour créer des automatismes, c’est-à-dire, créer des petites certitudes. Attention, on n’est jamais sûr de tout, mais au moins sur ce que nous on maîtrise, on a la certitude. Je prends un exemple tout bête. Tu rentres dans une maison où un forcené t’attend. Tu ne connais pas la maison, tu ne sais pas où sont placés les mobiliers. On est dans le noir. Par contre, la chose que tu dois absolument connaître est ta capacité au tir. Comment tu tiens ton arme ? Comment tu te déplacer ? Comment se déplace toute la colonne d’assaut ? Tu dois connaître différents types d’ouverture, différents types de porte. Comment tu vas les ouvrir à l’explosif ou pas ? En fait, si on maîtrise notre cœur de métier, ça nous libère le cerveau du stress de se dire : « je ne sais pas trop progresser dans le noir, parce que je ne vois rien. Comment je tiens mon arme ? »

Non, je suis solide sur mes appuis parce que j’ai répété ça dans des configurations folles et donc tous les types de configuration. Ce qui fait que quand je rentre dans la maison du forcené ou d’un preneur d’otages, je suis très zen dans ma tête parce que tout ce que je maîtrise est bien maîtrisé. Par contre, ça me laisse une porte ouverte à l’imprévu. Tu as la loi de Murphy, la LME (loi de l’emmerdement maximum) : tout ce qui va se mettre en travers de mon chemin et qui va me poser problème, ce qui fait que si je maîtrise une bonne partie de l’investigation par mon savoir-faire, par ma maîtrise de mon métier, ça me libère l’esprit de tout ce qui va être inconnu et ce que je vais pouvoir gérer avec toutes mes capacités mentales. C’est-à-dire que je suis bien positionné, bien sur mes appuis. Je vois quelque chose, je peux l’enjamber parce que je cours tellement. J’ai tellement marché et couru sur des revêtements improbables que je maîtrise ça.

Franck : D’ailleurs, je vais compléter cette question parce que tu dis :

« J’en tire une leçon, l’évaluation de soi-même avant d’effectuer un entraînement ou une mission dangereuse ne doit pas se faire seulement sur le plan physique, mais aussi sur le plan mental. Il est essentiel de savoir si l’on est réellement prêt. Se mentir revient à se mettre en danger et à mettre les autres en danger également ».

Pourquoi le mental et le physique qui sont-ils liés pour parvenir justement à ce type d’excellence dans ce type de mission ?

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Aton : L’exigence des missions, quand le GIGN intervient, on est le dernier rempart. C’est-à-dire qu’on a une obligation de résultat positif. On fait partie d’un collectif. Ce collectif, ce sont les 300. Quand on fait barrage, il ne doit pas y avoir de maillon faible. En fait, chaque maillon doit être fort. Chaque maillon doit être sûr de sa force physique, mais aussi mentale. C’est-à-dire que si physiquement tu es bien, mais que mentalement tu n’es pas prêt, tu n’es pas bon ce jour-là, tu vas être le maillon faible. Puis dans ta mission parce que chacun peut avoir une mission différente dans la mission, si tu n’es pas capable à 300 % de la remplir, qui va le faire à ta place ? Les autres, ils ont déjà leur mission, donc tu seras un point d’entrée, tu seras la faille où le forcené ou l’erreur va s’immiscer. Donc en fait, ça nécessite une bonne évaluation de soi, physiquement et mentalement. Ça après, tu vas l’exprimer dans ton groupe et tu vas dire : « aujourd’hui, physiquement, par exemple, j’ai une entorse à la cheville que j’ai faite hier au foot en salle ». C’est une faiblesse. Mentalement, je suis bien, mais est-ce que ça suffit ? Est-ce que ton mental peut faire que tu vas progresser n’importe où avec ta cheville en vrac. Parce qu’à un moment donné, ce ne sera pas un frein à l’action. Ta blessure ne sera pas un frein à l’action. D’ailleurs, on a eu cette dissertation en recrutement. Si, en fait. On va donc te donner une mission, peut-être d’appui, c’est-à-dire que tu seras allongé au sol parce que tu as ta tête qui est plein dans la mission, qui est à fond dans la mission. Mais ton physique, il n’y est pas. Donc, on va t’allonger avec un fusil, tu vas prendre l’appui pour tes camarades.

Si physiquement, tu es bon, mais que mentalement ça ne le fait pas, on te sort. Mentalement, c’est la priorité. C’est la priorité.  Donc là, on peut te sortir complètement d’une mission. Auquel cas, il y a un renfort qui prend ta place. C’est quand même mieux de l’anticiper, d’être sorti d’une mission, de ne pas dans la mission de dire je ne suis pas bien. J’ai très mal dormi. Je me suis pris la tête avec ma femme toute la nuit ou j’ai un bébé, il n’a pas dormi. Ça reste des hommes. Le matin, il y a une mission qui tombe, j’ai un poste clé, je dois avoir toute ma tête et mon physique, je suis fatigué. Je l’exprime. Il y a parfois suffisamment de monde parfois pour prendre ta place et il y a là ta place. C’est quand même mieux, plutôt que de ne rien dire, d’y aller, de s’assoupir en mission appui et qu’il se passe quelque chose où tu aurais dû traiter et tu ne traites pas et avec des conséquences derrière qui sont grave pour toi ou pire pour tes collègues, ou pire pour l’otage. Il y a toi, il y a tes collègues et il y a les otages.

Franck : Pour résumer ce que tu me dis, tu me dis si je me trompe, donc être fort c’est avoir conscience de ses faiblesses.

Aton : Bien sûr, et ça, c’est fluctuant. Il y a des jours où je me sens bien. Je suis capable de faire un certain nombre de choses et je vais le faire. Si je ne suis pas capable, je vais faire en sorte de prévoir d’être capable de le faire dans quelque temps. Par exemple, j’aimerais jouer en anglais. Ce n’est pas mon fort pour l’instant, pour l’instant, mais je ne désespère pas. Je travaille tous les jours mon anglais pour que dans quelques mois, je sois capable de jouer en anglais. Ce qui sera une corde de plus à mon arc.

Franck : Je vais te donner une autre photo parce qu’il me reste encore quelques-unes, figure-toi.

Aton : C’est joli ça.

Franck : Est-ce que tu peux me dire ce qu’il y a sur cette photo ?

Aton : Alors, sur cette photo, on voit la bouche de ma femme et la mienne en train de s’embrasser. Mais juste ça parce que je préserve ma famille, j’en parle peu. Je les mets vraiment de côté, parce que c’est mon jardin secret. Cette photo résume, ce qui me fait plaisir de voir ça, je me dis : « dans la vie, rien n’est gagné ». Mais aujourd’hui, ça fait plus de 21 ans qu’on est ensemble.

Quand on s’est mis ensemble, on est un couple mixte, ma femme est noire, je suis blanc. Même à l’époque, on ne misait pas un kopeck sur notre couple. On ne misait pas un kopeck sur le fait que je rentre au GIGN. En gros, tu as bien compris que surement on ne misait pas grand grand-chose quand j’avais 20, 21 ans. Ma femme a cru en moi. Je l’ai rencontré avant la gendarmerie, je travaillais en boîte de nuit et je faisais des trucs pas très clairs.

Franck : Il me semble qu’elle, tu me dis si je me trompe, travaillait dans un magasin de prêt-à-porter à l’époque.

Aton : De décoration. Elle avait une vie qui était plutôt bien rangée. Mes côtés bad boys lui plaisaient. Puis le côté très ambitieux lui plaisait aussi. Moi, j’étais très honnête avec elle. J’ai 21 ans et elle allait en faire 27, on a un peu plus de 5 ans d’écart. Elle avait envie de se poser, de se mettre en couple, moi pas du tout et je lui ai dit : « sincèrement, si tu trouves quelqu’un, fonce parce que moi ma priorité, ce sera toujours le GIGN et mon projet d’acteur avant toi ». Tu passeras toujours en second plan. Il fallait l’entendre. Elle m’a dit : OK, on va voir.

Puis, après avoir été six mois avec elle, j’ai mon père un jour, je m’en souviendrais toujours qui me dit : « tu vas toujours à Toulouse ? » Moi, j’habitais à Saintes. Elle habitait à Toulouse, elle était rendue là-bas tout le temps. À l’époque, moi, je sortais avec plusieurs filles, mais honnête, je lui disais. Puis, elle me plaisait bien. C’est vrai que j’étais tout le temps rendu chez elle et tout. Mon père me dit : « engage-toi ! » Je dis : « non ! » Il me dit : « tu risques de la perdre ». Puis là, j’ai réfléchi, je dis est-ce que j’ai vraiment envie de la perdre. Non !

Un soir, je me souviens, j’étais surveillant dans un CFA de nuit et j’étais allongé sur un lit une place, tu sais les chambres, vraiment le minimum. Je posais des questions sur ma condition et tout ce que j’allais faire puis avec elle. Je regardais le plafond et j’ai pris conscience. Je me suis dit est-ce que ce n’est pas le moment d’avoir une femme. J’ai 21 ans et dire de prendre la responsabilité. Pour moi, c’était une responsabilité de dire que je suis en couple, c’est-à-dire que j’assume pour deux. J’ai pris mon téléphone. C’était un Itinéris à l’époque, j’ai sorti l’antenne et je compose le numéro et je l’appelle.

Je lui dis : « c’est moi, est-ce que tu veux le toujours ? Est-ce qu’entre nous, c’est toujours bon ? » Elle me dit : « bah oui, qu’est-ce qui t’arrive ? » Je dis : « non, je voudrais te dire qu’aujourd’hui, tu sais que je t’avais dit que si tu rencontrais quelqu’un de partir, quelqu’un de sérieux, que moi je n’étais pas sérieux. J’ai dit là, je compte vraiment m’engager avec toi. Ce qui fait que tout ce qui t’arrive de bon ou de mal, ça passe par moi. Surtout ce qui t’arrivera de mal, ça passera par moi. Tu n’es pas tout seul. Mais comme c’est une grosse responsabilité, j’avais besoin de réfléchir. Et aujourd’hui, je te le dis que oui, tu as un homme sur qui tu peux compter et que personne ne te fera du mal parce que je suis là. Puis, si tu as un problème, à n’importe heure qu’il soit, tu m’en parles et je serai là. J’arrêterai ce que je fais pour être avec toi. Maintenant, c’est vrai que je veux être GIGN, je vais être acteur, ça fera partie de ma vie et là-dessus, c’est un gros engagement de ta part aussi. » Elle m’a dit : « oui, je te suis ». Et elle me suit encore.

Franck : Tu as répondu un petit peu à la question que je voulais te poser, mais je vais te la poser quand même. Par rapport aux deux passages qui vont étayer cette photo, tu dis dans le livre, ce sont vraiment des passages qui m’ont peut-être le plus marqué, parce que ce que je suis marié et j’ai aussi un petit garçon, donc ça m’a vraiment beaucoup marqué ces passages-là. Tu dis :

« Mes enfants ne s’habituent toujours pas à mes absences et j’ai parfois la sensation de rater quelque chose avec eux. Comme si des pans entiers de leur enfance m’échappaient ». Donc ça, je précise que c’était avant de partir en mission en Irak. « À chaque retour, il me faut les reconquérir et leur faire oublier les habitudes qu’ils ont prises pour compenser mon absence. »

Il y a un autre moment où tu écris, j’ai pris ma petite note pour être sûr de ne pas me tromper dans la page, un autre passage aussi où tu écris un moment quand même très important. On y viendra par la suite. Ta femme te demande quelle est ta place dans la colonne d’assaut et tu lui réponds. C’est la retranscription d’une conversation téléphonique.

Tu lui réponds : quoi ma place ?

Elle te répond : quel est ton numéro dans la colonne, dis-moi la vérité !

Tu lui réponds : ne t’inquiète pas, tout va bien se passer et puis au pire, s’il m’arrivait quelque chose, arrange-toi pour que l’on ne retienne que ce que j’ai fait de bien.

Elle te répond, c’est une femme de caractère, on le voit : je t’ai demandé ta place Philippe.

Tu réponds : dans le groupe de tête, voilà. On nous fait confiance, vois-tu. Ce qui arrive après, c’est de la destinée.

Elle te répond : Phil, courage, on est avec toi, je t’aime.

Toi, tu réponds : Ed, je te fais confiance pour les petits, je t’aime aussi très fort !

Ce passage-là, franchement, c’est poignant. Pendant des années tu le dis, tu l’as dit tout à l’heure, tu t’es entraîné avec comme objectif pour être au GIGN, tu as été focus sur ton objectif, quitte à mettre tes enfants d’un côté, quitte à mettre ta femme de côté pour cet objectif. Donc déjà, pourquoi ? Pourquoi tu te fixes comme ça, ton objectif ? Comment tu y arrives ? Surtout comment tu as géré la réaction de tes proches ? Parce que tu en parles très légèrement dans le livre, mais c’est quelque chose qui m’intéresse. Parce que souvent aussi, je parle beaucoup d’entrepreneuriat sur ma chaîne. C’est pour ça que je fais la liaison avec ton livre, c’est qu’il y a des similitudes. C’est-à-dire que des fois, on doit prendre des décisions et il y a des gens qui ne peuvent pas le comprendre. Je voudrais vraiment avoir ton avis sur ça.

Aton : Le GIGN, c’est un engagement extrêmement fort et extrêmement lourd. Ce que je disais avant, par rapport à ma femme, ce sera le GIGN, il faudra que tu sois très forte. Ce sera un engagement de ta part. Elle a accepté cet engagement et on a eu des enfants. Et les enfants, eux n’ont pas choisi que je sois GIGN. Pour eux, c’est dur quelque part. C’est dur pour eux, mon absence, mais ils n’ont connu que ça, ils n’ont pas d’autres références. Pour eux, le père, il est là, il n’est pas là. Voilà, c’est comme ça. Ce n’est pas forcément dur.

Franck : Ils avaient quel âge au moment de la mission en Irak ?

Aton : Ils étaient jeunes, ils avaient quatre et six ans. Ils avaient quatre et six ans, donc c’est vrai qu’à l’époque comme je disais tout à l’heure encore, tout se construit. Alors, je n’avais pas beaucoup de moments avec eux, mais c’est vrai que ces moments que j’avais, on a toujours axé la relation sur la communication. Je ne les ai jamais trop ménagés. Je leur disais quand c’était bien, je leur disais quand ce n’était pas bien. Je leur donnais des conseils, un avis.

Encore mon fils, il y a quelques jours de ça fait des choix. Je suis entièrement d’accord avec ses choix. Là, il veut faire une année sabbatique après le bac. Moi, il n’y a pas de souci. S’il ne sait pas ce qu’il veut faire, autant qu’il fasse une année sabbatique, mais attention ce n’est pas une année à ne rien foutre, c’est une année à parcourir le monde. Justement, ça va être l’année peut-être la plus chargée de sa vie parce qu’il va chercher qui il est et connaître son environnement.

Mais c’est vrai que c’est un choix de les mettre un peu de côté au bénéfice du GIGN. Et le GIGN est une grosse machine où on ne fait que passer. Quand on le quitte, il ne faut pas avoir de regrets à se dire : je n’étais qu’un numéro de brevets, je suis passé, j’ai été remplacé. La situation en France, elle n’est pas meilleure. Et tout ça pourquoi ? J’ai quand même loupé. J’ai eu cette question. Au final, je me dis que le père que je suis, c’était comme ça, à moi de donner de la qualité dans ces moments, mais, on ne peut pas tout faire bien dans la vie. Si on court après tout pour tout faire bien, on se prend les pieds dans le tapis, on se vautre. Donc, j’ai tout fait pour être un bon GIGN. Avec le recul, d’après ce que disent mes pairs, j’étais un bon GIGN. Donc, je suis satisfait de ça.

En étant un bon GIGN, j’ai donné quelque part un point de référence dans le sens de l’engagement et dans certaines valeurs à mes enfants, j’ai donné certains exemples. Et en tant que père, je pense qu’il y a eu des manquements par l’absence, des moments où j’étais très fatiguée où j’avais l’opportunité de faire des choses, mais la fatigue était telle que je ne pouvais pas. J’ai préféré me reposer plutôt que de vivre des moments parfois avec eux. C’est dur, mais j’ai essayé quand même de donner de la qualité dans certains moments, vraiment.

Je pense que j’ai quand même été présent d’une manière ou d’une autre par le biais de ma femme aussi et j’ai toujours eu des exigences quant à leur éducation. C’est-à-dire que ce n’est pas parce que je suis absent que je ne peux pas faire la police en entrant. Ce n’est pas parce que je suis absent que je vais laisser passer la médiocrité entrer dans la maison. Donc, ça reste ma maison. Là, je suis encore très souvent absent. Mes fils, ils connaissent les règles.

Là maintenant, ils ont 15 et 17 ans, ce sont presque des hommes. Il y a de ça des années en arrière, ils auraient été à la guerre. Moi, j’ai toujours cette vision. Ils ont le sens des responsabilités. Ils savent que quand je ne suis pas là, ils prennent un certain relais dans la défense de la maison, dans la protection de leur mère et tout ça. Et ils savent faire. Et quand je suis là, on communique énormément. On fait les sports de combat ensemble. Maintenant, je fais de la musculation un peu avec mon plus grand. Alors, il monte en niveau, il me rejoint. Alors, je le laisse un peu. Je l’observe, je lui donne des conseils. Puis, il y a un moment donné, il me dépassera. Mais oui, je n’ai pas tout fait bien. Ça, j’en ai conscience. J’aurais peut-être des reproches que plus tard et je les accepterais. J’en prendrais la responsabilité et je leur réexpliquerais quelles étaient mes choix. Après, ils sont en accord avec ça ou pas. En tout cas, moi je les aime, je leur ai donné beaucoup d’amour. Ma femme leur donne beaucoup d’amour aussi et on fait du mieux qu’on peut avec ce qu’on a.

Franck : Tu ne veux pas les mettre à la guitare.

Aton : Mes enfants alors là par contre, il y a un truc. C’est vrai que dès qu’ils m’expriment un souhait, c’est là où je suis, où je ne suis pas très bon. Ma femme me dit que je suis un peu papa gâteau. Ce n’est pas pour combler l’absence, mais j’ai envie qu’ils ne manquent de rien. Quand ils me disent, mon plus petit souvent, le plus jeune lui, il a plein une chose en tête : j’aimerais bien faire ceci. Il s’intéresse à beaucoup de choses.

En fait, dès qu’il s’intéresse à un sujet, je vais lui donner. Par exemple s’il se met à la guitare, je vais lui trouver une Ibanez, le truc dernier cri qui va me coûter une blinde et je vais lui donner. Ça va durer un mois après, il va les mettre dans un coin. Après, je vais l’engueuler, je vais lui dire : « tu m’as fait payer ça ». Il va me dire : « je ne t’ai rien demandé papa. C’est toi qui me l’as… » Voilà parce qu’on essaie de donner au maximum. Mais après, j’essaie aussi parfois de ne pas leur donner pour qu’il aille chercher eux-mêmes les choses. Comme moi, ça m’est arrivé, mais c’est dur. C’est dur.

Franck : C’est du taf. Papa, c’est…

Aton : C’est un métier à temps complet. C’est très dur.

Franck : Écoute, Aton, je suis désolé, mais il y a bien des photos qui vont te faire moins plaisir. Enfin, je pense. Vu que j’ai lu le bouquin, je pense qu’il va te faire moins plaisir. Je te laisse me dire qui est cette personne.

Aton : Elle a vieilli, elle a pris un coup de vieux. Ce n’était pas la garde des Sceaux, Rachida Dati. Quand je vois Rachida Dati, je n’ai pas de mauvaises pensées. Pour moi, c’est une personne qui a eu de l’ambition, qui a été au bout de son ambition, qui a été ministre et qui a été garde des Sceaux, qui avait des responsabilités. On s’est croisé sur une mission où elle est venue avec sa vision de la crise. Moi, je suis arrivé avec ma vision de la crise. Et à un moment donné, elle a eu des exigences qui n’étaient pas forcément en adéquation avec ma mission.

Franck : Est-ce que tu peux parler de cette mission ?

Aton : C’était Fleury-Mérogis en 2008, 1er septembre 2008 où en fait un preneur d’otages, un détenu prend en otage son psychologue avec une lame. Le psychologue est sur une chaise. Lui, il est debout derrière avec une lame et il crochète la carotide. Il est prêt à l’égorger. La prise d’otage va durer dix heures. La négociation va durer huit heures. Ça se conclura par un tir que j’effectue dans le cou du preneur d’otages pour garder vivant le preneur d’otages et, bien sûr, l’otage. Mais il faut savoir que pour nous, GIGN, le plus simple était de faire un tir tête. C’est-à-dire qu’en tirant dans le cou, j’ai pris énormément de risques pour la vie de l’otage. Il faut savoir que le preneur d’otages était prêt. On l’a eu dans les négociations après.

Franck : Florent Bianchi.

Aton : Florent Bianchi.Ce n’est pas dit, tout n’est pas dit dans un livre. Bien sûr, il y a toute une face qui est cachée, mais c’est presque à se demander si ce n’était pas ce qu’on appelle un suicide by cop, s’il ne cherchait pas à sortir de la prison, mais d’une manière, il revendiquait, il voulait éviter la prison. Il savait bien que c’était impossible. En fait, en prenant cet otage-là de dire à un moment donné, vous négociez, vous négociez, mais à quand vous allez m’en mettre une.

C’est mon interprétation. Elle est arrivée. C’est marrant parce que j’ai eu une discussion à propos de Nicolas Sarkozy avec un de ses amis qui me dit : « oui, je trouve que tu as été un peu dur dans le livre avec Rachida Dati ». Moi, je suis dur avec la fonction, je suis dur avec leur vision à un moment sur une mission. Je ne remets pas en cause qui est Rachida Dati, si c’est une mauvaise personne ou une bonne personne. Je ne la connais pas. Moi, on me dit, demain, tu vas aller boire un verre avec elle et vous allez discuter de ça. Mais, je serai enchanté. Mais, je lui dis voilà ma vision. Ce que j’aimerais, c’est dire pourquoi vous nous avez imposés, vous nous avez mis des contraintes qui mettaient en danger l’otage. À un moment donné, le preneur d’otages, il a pris ses responsabilités. Il nous met en difficulté pour sortir de la crise. Quand on vient à tirer au GIGN, c’est qu’on n’a pas d’autre choix. La négociation, je peux le dire, elle a été poussée à l’extrême, à l’extrême. Il donne des ultimatums. À 20 heures, il y a un ultimatum où il dit dans une demi-heure, j’égorge l’otage. Moi, je dis : « on tire, on y va ». Non. On nous dit : « non ».

Franck : Rachida Dati, alors Ministre de la Justice, dit de ne pas vouloir le moindre coup de feu.

Aton : Mais, c’est le monde des Bisounours. Elle a son monde et moi, j’ai le mien à cette époque-là. Si j’avais pu lui parler en direct, je pense que j’aurais exprimé les choses, peut-être pas de la bonne manière, mais j’aurais dit : « je crois que vous n’avez rien à foutre là. Là, ça dépasse vos compétences. Vous gérez ça après d’un point de vue politique et médiatique. Mais en l’occurrence, il y a un drame humain qui est en train de se passer, il y a une crise. La gestion de la crise, ce n’est pas vous qui avez les clés. Vous avez les clés politiques et médiatiques. Et là, on est dans une crise ou du monde réel, avec des exigences bien réelles et des priorités à faire. Vos priorités politiques et médiatiques mettent en danger un homme, voire plusieurs. » C’est des choix politiques, médiatiques qu’elle fait, que sa fonction lui impose, ça ne fait pas d’elle une mauvaise personne.

Franck : Bien sûr. J’ai pu le constater déjà dans le livre. Moi aussi, je suis assez pragmatique comme personne, c’est-à-dire de segmenter. Tu l’as dit à juste titre, Rachida Dati, il se trouve que c’est une personne très agréable. Mais là, en l’occurrence, je pense qu’il y avait un petit problème de communication. Dans le livre, j’ai pu le constater à plusieurs reprises, c’est que les politiques ralentissent souvent les actions du GIGN à plusieurs reprises. On va y venir dans la suite aussi de l’interview. Pourquoi on doit se fier à l’expertise du professionnel en premier lieu ?

Aton : Parce que justement, c’est l’expertise du professionnel. Moi, j’ai très mal en parlant politique, je balance des noms, je m’en fous. C’était Cazeneuve. À la période des attentats qui demande à ce qu’il y ait des GIGN. Il fait presque la promesse que le GIGN sur le lieu de la crise en 20 minutes. Pardon. Excusez-moi, mais à un moment donné, il faut peut-être venir au GIGN et qu’on en discute. Parce que les délais d’intervention, c’est un peu nous qui les fixons.

Les modes opératoires, les stratégies à mettre en place, c’est un peu à nos officiers, à nos chefs et aux sous-officiers les plus expérimentés de mettre ça en œuvre et de faire une proposition. Donc, ça va dans ce sens-là, c’est-à-dire que l’expert, le professionnel fait un constat. Il évalue la crise et il définit des modes opératoires pour sortir de cette crise, avec différents risques pour les GIGN ou pour les otages. Il évalue les dommages collatéraux possibles. De ça, c’est proposé au politique qui va dire : « voilà, ça, je l’assume. Ça, je ne l’assume pas. » Donc, on va prendre ce choix-là. Nous, à nous, experts, de tout mettre en œuvre pour faire le résultat, on doit faire ce qui est annoncé. On doit faire ce qu’on a dit.

Mais que le politique arrive face à un constat et dit : « vous allez faire ça, vous allez mettre autant de tireurs-là. Puis vous allez mettre un dispositif. » Je ne vais pas dire les lieux parce que je ne sais pas si c’est secret ou pas. Mais il y a des choses qui ont été faites parce qu’on a été aux ordres des politiques à un moment donné, où le GIGN où ça a créé une faiblesse à un moment où on était en pleine période attentats. Et ça, ça n’a pas tenu longtemps. Dieu merci. Mais à un moment donné, il faut arrêter les conneries.

Quand tu es ministre de l’Agriculture, tu es le champion du monde de l’agriculture. Quand deux mois après, tu te retrouves ministre de l’Intérieur, je ne sais pas, je dis ça. Mais à un moment donné où tu es éducation nationale et tu passes intérieur, attention, tu rentres dans un domaine de compétence où tu découvres les choses, tu es un nouveau-né. Donc, tu prends la responsabilité parce que c’est ton taf et tu es câblé pour ça. Mais ça ne fait pas de toi Superman et champion du monde qui va tout résoudre et tout va sortir de ton cerveau. Non, tu es aidé donc écoutes. J’ai du respect malgré tout, pour la fonction. Mais tu as bien compris que ça touche un peu mes nerfs. Je n’apprécie pas qu’on me dise : « vous allez faire comme ça. Non. »

Franck : Parce que je pense que tu ne lui donnes pas de conseils. Tu ne donnerais pas de conseils à un politique sur une décision politique.

Aton : Non, mais je me rends compte parfois que vu ce qui se permettent, je pourrais.

Franck : C’est un autre débat. Écoute, il y a eu un autre passage aussi du livre qui m’a vraiment très intéressé pour faire suite. D’ailleurs, on a commencé à en parler des attentats. Tu écris :

« C’est à cette occasion que je réalise que c’est développé insidieusement et bien souvent malgré eux, une sorte d’aversion au risque chez nos chefs et plus encore chez nos autorités politiques. Cette aversion semblable au principe de précaution qui prévaut de plus en plus dans nos vies courantes implique qu’il vaut mieux avoir tout en ne prenant aucune initiative que de risquer de jouer sa carrière ou sa vie pour une noble cause ».

Ou encore :

« La culture du risque n’est rien d’autre que la connaissance approfondie des mécanismes de la prise de décision ».

C’est super intéressant ce que tu dis. Comment la culture du risque peut permettre d’évoluer ? On en a parlé un peu déjà, mais si on peut vraiment approfondir le sujet, ça m’intéresse. Qu’est-ce que tu dirais à une personne qui redoute dans le risque, qui redoute tellement dans le risque que ça peut l’inhiber dans son action ? Il y a des gens des fois, tellement ils ont peur et ils ne peuvent pas passer à l’action.

Aton : C’est qu’en fait, on a tous des rêves quand on est enfant. Il y a toujours un chemin pour y arriver. Là où il y a une volonté, il y a un chemin. Quand on rêve de quelque, il y a un certain nombre de choses à mettre en place pour y arriver. Ces choses qu’on va mettre en place, ce chemin, il peut être risqué. Vouloir tenter le GIGN, c’est prendre le risque d’un entraînement difficile, de faire des obstacles où on peut se gaufrer, on peut se blesser grièvement qui peut mettre fin à tout. Non seulement, j’ai été blessé, des gens qui ont été sortis du GIGN parce qu’ils se sont blessés, mais qui ont été réformés suite à la blessure qu’ils ont eue au test ou au pré-stage. C’est toujours une prise de risque.

Alors, il y a la solution de ne rien faire. En fait, dans la vie, quelque part, il y a deux grands chemins. Tu as le chemin de tes rêves, de ton ambition, de ta volonté. Tu veux aller là, c’est ton ambition, c’est ton projet. Mais tu sais qu’en fait, il y a un certain nombre de risques. Tu risques de te casser la gueule. Ça va ne pas être simple.

Puis, le premier risque, il est là, puis tu décides de ne pas prendre ce chemin-là. Tu choisis celui-là. Parce que celui-là, il n’y a pas de risque. Celui-là, il n’y a pas de risque. Et il va où ? Tu sais, sur les gens qui sont aigris, qui n’ont jamais tenté, qui n’ont jamais réussi et ils vont regarder ceux qui sont là et ils disent : « ils ont de la chance, c’est tout. » Parce qu’ils ne voient pas le travail qu’il y a. Dans la vie, il y a deux possibilités. C’est soit tu prends des risques et tu vas sur le chemin qui te mène à tes rêves, soit tu ne prends pas de risques, tu ne fais rien. À ce moment-là, focalise sur toi et ne critique pas les autres et ne sois pas jaloux, ne sois pas rageux, mais content-toi de ce qui viendra à toi. Soit, tu vas chercher, soit ça vient à toi.

D’expérience, il n’y a pas grand-chose qui vient. Même le loto, il faut aller au guichet, il faut aller jouer. On n’est jamais venu chez quelqu’un avec un chèque du loto et dire vous n’avez pas joué, mais vous avez gagné. Un réalisateur, un producteur n’est jamais été dans le salon d’un acteur qui ne se bouge pas le cul pour lui proposer un rôle. Moi, je veux jouer au cinéma. J’ai voulu rentrer au GIGN. Pour le GIGN, je me suis donné les moyens. Je me suis dit : « je vais rentrer à 25 ans. Je ferai 15 ans à peu près. Je quitterai à 40 ans pour être acteur. » 15 ans, c’est très long au GIGN. De 16 ans jusqu’à 25 ans, j’ai pris des risques. J’ai pris des risques pour avoir une expérience de vie. J’ai fait le tour d’Europe en stop. Je suis allé à Moscou. J’ai pratiqué les sports de combat haut niveau. J’ai fait mon service chez les paras, ce qui est assez dur et tout. J’ai voyagé. Je me suis prouvé. J’étais en boite de nuit. J’ai eu le contact le combat de rue. Je savais que ça me donnerait des armes pour réussir le GIGN. Ces risques-là m’ont aidé.

Et là, pour le cinéma, je ne vais pas attendre que Scorsese vienne dans mon salon parce qu’il ne viendra pas. Donc, c’est à moi de me bouger. Je dis Scorsese, c’est un exemple, mais d’aller voir des réalisateurs, de me présenter sous le meilleur profil. Parce que ce que j’ai remarqué, c’est que les producteurs et réalisateurs n’ont pas beaucoup d’imagination quand il s’agit parfois de casting. Moi en voyant ma tronche, j’ai plein d’idées pour moi. Donc, c’est à moi d’aller chercher.

Moi, il me voit pratiquement que dans le rôle de bureau bodybuildé, un peu neuneu, le gros costaud, la bagarre, etc. Sauf que mon parcours et pas seulement mon cerveau, et ce que j’en ai tiré un bagage émotionnel, une expérience qu’on peut mettre au profit d’autres histoires, d’autres choses. Mais ça, ce n’est pas aux producteurs et aux réalisateurs d’aller me chercher pour ça. C’est à moi de leur montrer mes capacités et c’est à moi d’aller chercher des rôles ou de me mettre en danger sur certains films pour montrer certaines choses. Puis après, c’est à moi de le diffuser parce qu’il ne faut pas que je compte que sur la diffusion du cinéma ou Netflix. Non, c’est à moi de me mettre en scène aussi et de partager en masse.

Les réseaux sociaux, attention, je ne suis pas de la génération Instagram. Moi, j’ai 43 balais. Quand je dis en conférence face à des à des ados, je dis vos parents, ils sont comment sur Instagram ? Ils ne maitrisent pas du tout. Je dis : « moi, j’ai l’âge de vos parents. Imaginez vos parents qui se mettent à Instagram. Imaginez le travail que c’est. Ah ouais ? » C’est le travail que j’ai fait. C’est-à-dire en 2013 ou 2014, quand Instagram est arrivé, je me suis dit : « ce truc-là en 2019 – 2020, quand je vais commencer le cinéma, ça peut être un bon outil pour moi. Mais attention, il ne faut pas que je démarre en 2019 pour 2020. Sinon, j’aurais combien de followers. J’en aurai 150. Montrer à 150 personnes c’est bien, mais montrer à 92 000, c’est quand même mieux. On a plus de chance de taper à la bonne porte. »

Donc tout ça, c’est de l’anticipation, c’est du travail, c’est de la prise de risque. Et les réseaux sociaux sont une prise de risque en permanence. Une interview est une prise de risque, mais moi, je m’autorise l’erreur. C’est-à-dire qu’en venant, tu vois même là, sur l’interview, je viens, tu as vu, je suis décontracté. Tu me poses les questions. Je ne t’ai même pas demandé les questions avant. Je ne veux même pas savoir. En général, je ne veux même pas savoir. Je préfère avoir la surprise parce qu’au moins, ma réaction est spontanée et sincère. Mes réactions appartiennent aujourd’hui le 16 octobre, on est le 16 octobre, ce que je vais dire appartient à un instant T, à un moment T. Dans cinq ans, tu reçois l’interview, tu dis tu as dit ça, mais regarde par rapport à la conjoncture … Oui, ça date du 16 octobre 2021. Aujourd’hui, ma vision sera peut-être un peu différente. Puis, ce que je veux dire aujourd’hui, si ça choque ou machin, ce n’est pas grave. Moi, je l’assume.

Franck : OK. Quand on lit le livre que je recommande et quand on regarde ton parcours, on se dit un peu, ça va te faire marrer. Après avoir parlé de sujets qui font moins marrer, on peut parler de ceux qui font marrer. Moi, personnellement, quand j’ai lu le livre, je me suis dit ce mec-là, il ne connaît pas la peur ou quoi. Je lis les trucs, je me dis des fois, je relis le passage, il est fou. Je me dis, mais il est fou. Il n’a pas peur, il n’a jamais peur. Est-ce que tu as déjà eu peur ? C’est ma première question et je vais t’en mettre une deuxième à la suite. Et si oui, c’était lors de quelle situation et comment tu as fait pour la contrôler ? Parce que ça, je pense que c’est vraiment le plus important.

Aton : Alors, la peur si, la peur et le doute. Je doute énormément de moi. Pour pallier à ça, je me remets beaucoup en question et c’est ce qui fait que le doute ne dure pas. Les peurs, je fais partie de ceux qui en ont peut-être le plus. Mais comme je travaille dessus, je fais partie de ceux où ça ne se voit pas trop parce que les peurs sont différentes. Il y a des peurs : la peur de ne pas réussir son objectif, la peur de ne pas avoir donné une bonne éducation à ses enfants. Ce sont des choses qui sont un peu constantes. On verra plus tard, mais on n’est pas à l’abri. Même à 40 ans, le gamin qui a un problème psy et que ça vienne de ce qu’on a donné quand il avait 8, 10 ans. Donc, on n’est jamais sorti de cette peur-là. Il y a des peurs auxquelles je vis avec. Mais il y a des peurs sur lesquelles j’ai travaillé.

Par exemple, l’une de mes premières missions. On nous annonce un peu le pedigree du gars, un gros criminel. J’avais la responsabilité d’ouvrir la porte, de rentrer au bélier, ce qui n’est pas une science exacte. C’est pour ça que j’ai bien travaillé à l’explosif. Je savais que là, je pouvais charger et c’était bon. Le bélier, ce n’était pas une science exacte, donc selon les portes, une responsabilité. Peur de l’échec, déjà, qui engendrait un risque pour mes collègues. C’est-à-dire que plus je mets de temps à ouvrir la porte, plus la personne qui est derrière est avertie qu’on arrive et peut se préparer et peut effectuer un tir qui sera mieux placé que s’il est pris par la surprise. Tout ça, en fait, c’est de se convaincre. Ça, c’était mes premières peurs au GIGN, peur déjà de faire échec sur l’ouverture de porte.

Franck : Peur pour toi, peur pour l’équipe, peur pour le résultat.

Aton : J’ai souvent plus eu peur pour les autres que pour moi-même. Moi, je crois en la bonne étoile pour moi-même, c’est-à-dire que je peux marcher sur un fil. Si ma bonne étoile est là, j’irais du point A au point B sans me casser la gueule. Maintenant, attention, il faut que le jeu en vaille la chandelle. Je ne prends pas des risques si j’ai peur et que j’estime que ça ne vaut pas le coup. Je reste sur ma peur et je mets de côté et je passe mon chemin. Si maintenant j’estime que la prise de risque est obligatoire non seulement pour moi, mais encore plus pour autrui pour améliorer une situation, ma peur, je vais la gérer et je vais la gérer en me remémorant des situations à peu près semblables que j’ai pu connaître et me rassurer et me dire attention, je suis quelqu’un de nature qui doute, qui peut avoir peur. Donc, ne te laisse pas entraîner par ta peur, ne te laisse pas gangréner par une peur qui est installée par toi-même, par une partie de ton cerveau. Donc à toi, par ta connaissance technique, par l’assurance que tu peux avoir dans tes gestes techniques et puis ta détermination à franchir les caps, les obstacles pour te mettre en confiance et réussir.

Donc, c’est un travail qui n’est pas permanent. Je doute en permanence. Là, j’ai été pris pour un film de James Huth. Je tourne avec Jamel Debbouze et Daniel Auteuil. Quand j’arrive sur le plateau, je doute de moi. J’ai parfois quand on me conférence ce syndrome de l’imposteur. Puis, à un moment donné, je me dis merde. Je l’ai expliqué sur le TEDx ce syndrome de l’imposteur. J’ai subi beaucoup de critiques, mais comme tout le monde. Sauf que quand on est sur les réseaux sociaux, c’est puissance dix, puissance 100, 1000 donc, ça peut mettre le doute. À un moment donné, on pose le genou à terre. Puis à un moment donné, il faut se refaire le bilan un peu de qui on est et ce qu’on a fait.

J’ai eu la chance d’avoir un parcours riche avec des caps qui ont été franchis, des obstacles qui ont été franchis avec brio. Je le dis maintenant avec du recul. Ça ne veut pas dire que je vais réussir tout ce que je vais faire plus tard, mais ça me met en condition. C’est-à-dire que tout ce que j’ai réussi à passer, toutes les peurs que j’ai réussi à maîtriser, à gérer dans ma carrière GIGN, j’ai appris à gérer ces peurs. Et maintenant quand je suis sur un plateau, est-ce que je connais mon texte ? Oui, par cœur. Alors là, par contre, ce sont des choses par cœur, dans tous les sens. Est-ce que j’ai la légitimité ? Est-ce que le réalisateur était sûr de son choix ? Si je ne suis pas sûr, je vais le revoir et je vais lui demander.

James, tu es toujours en accord sur le fait que je sois acteur sur le film. Ça te satisfait ce que j’ai fait là déjà ?

Ah oui.

OK, tu as confiance en moi pour la suite ?

Oui, oui.

OK.

Puis après, c’est de l’humain. C’est regarder Daniel Auteuil droit dans les yeux, Jamel Debbouze droit dans les yeux et de me dire : « toi, tu as ta place ici. Mais moi, j’ai ma place aussi ici. » Puis on va la jouer cette scène et on va se faire plaisir. Malgré la peur de mal faire, parce qu’un film, ça coûte cher, une journée de tournage, ça coûterait très cher. Il y a quand même une pression. Moi, je me libère de ça. On est là parce que c’est nous. En fait, on a été choisi pour ça et on est les meilleures personnes actuellement pour jouer ces rôles-là. Parce que c’est nous. Donc, j’essaie de me libérer. Mais la dernière peur, c’était sur les plateaux où à un moment donné, je me dis ah, putain.

Franck : Je vais te donner la dernière photo. Je pense que celle-là va te faire plaisir. J’espère.

Aton : Belmondo. Ah ouais.

Franck : C’est vrai qu’il est un peu petit.

Aton : Ma première idée, c’est Belmondo, mais après, je ne sais pas.

Franck : Belmondo dans le magnifique.

Aton : Belmondo fait partie de mes inspirations.

Franck : Ça tombe bien.C’est pour ça que je t’ai donné la photo.

Aton : Moi, j’adore. Il ne faut jamais comparer les gens. Moi, je ne me suis jamais comparé. C’est une erreur de se comparer, de comparer une carrière, de comparer un acteur à un autre. Mais il y a des personnalités. Il y a des personnalités qui sont présentes et dont la société a besoin. En ce moment, il y a un besoin, il y a un besoin de Belmondo. Je ne trouve pas dans le paysage. Il y a de très bons acteurs dans leur domaine, dans ce qu’ils jouent et tout ça. Mais il y a un manque d’engagement, je trouve.

Attention, Belmondo ne faisait pas de politique, mais dans son jeu, le personnage était engagé dans ses missions. Je me souviens du Professionnel. C’est l’un des films qui m’a vraiment marqué après Itinéraire d’un enfant gâté différemment sur des choix de vie, le choix assumé, puis le retour et tout un tas de choses. Ces philosophies sont super intéressantes. Mais pour le professionnel, ce que j’aime beaucoup, ça me ramène à ma carrière. Je n’ai pas toujours été suivi. J’ai pris des risques parfois dans des pays étrangers où on était un peu abandonné. Et le professionnel, sincèrement, je l’ai vécu comme ça.

Alors moi, je ne me suis pas fait flinguer au pied d’un hélico après. Mais ce mec-là, cet acteur-là, cet homme-là a été une grosse inspiration, tout petit. Quand j’étais petit, j’avais un magnétophone avec des cassettes et je passais la musique du Professionnel et j’écrivais des scénarios sur cette musique. Je jouais tout seul, dans ma chambre. Il n’y avait pas de caméra, il n’y avait rien et pas téléphone portable et je jouais des scènes où je mourrai. Je jouais au cinéma avec la bande originale du film, notamment Chi mai d’Ennio Morricone. En fait, le personnage que jouait Belmondo m’a inspiré beaucoup, mais l’homme m’a inspiré beaucoup dans les interviews. Moi, j’aimais cette prestance qu’il avait et c’est un mec sur qui on n’a pas misé un kopeck aussi au début.

Aton : Moi, à sa mort, je ne suis pas allé aux obsèques. Je n’ai pas fait partie des privilégiés pour aller aux Invalides à l’intérieur. Il y en a qui m’ont proposé qui m’ont dit : « tu peux aller à l’extérieur ». Mais, je trouvais que c’était déplacé. Maintenant, on ne va pas se mentir, j’ai une notoriété. Les gens dans la rue me reconnaissent. Ça aurait été déplacé, je trouve, d’attirer l’attention sur moi à l’extérieur, au milieu de tout le monde à ce moment-là. Puis, si je n’ai pas été à l’intérieur des Invalides, c’est qu’aux yeux du cinéma français, je n’ai pas encore trouvé grâce. C’est que je n’en fais pas encore partie de cette famille du cinéma qui a perdu un des parrains. Donc, à moi de travailler pour en faire partie. Puis, je n’avais pas ma place ni d’un côté, ni de l’autre, donc je suis resté chez moi. Je l’ai regardé, j’étais très ému. En plus, la musique que j’aime, ça m’a tiré les larmes. Vraiment, j’ai eu un chagrin. Pour moi, Belmondo représentait vraiment quelque chose d’énorme. Je le savais. J’avais même été chez lui.

La préface de « GIGN, confessions d’un OPS », s’il y avait eu une préface, s’il y avait dû en avoir une, c’était Belmondo, le premier choix. Je suis même allé chez lui, c’était rue des Saints Pères, mais a priori, il n’habitait plus là et je suis rentré. J’ai attendu que quelqu’un rentre. J’ai passé la journée. Il n’y a pas de passage. J’ai galéré, ça a caillé en plus. Je n’étais pas habillé pour. Je suis resté la journée et un moment donné il y a quelqu’un qui est rentré. J’ai réussi à rentrer. J’ai fait tous les étages, toutes les portes. J’ai frappé à toutes les portes. Il y a quelqu’un qui m’a dit : « mais non, il n’habite plus ici ». Je ne croyais même pas à la personne. Moi, je me suis dit, mais ce n’est pas possible et je suis resté. Je suis resté, je me suis dit jusqu’au soir et à un moment donné, je me suis résigné. J’ai dit bon, je vais rentrer. Je suis même allé dans un restaurant dans lequel il va régulièrement le dimanche. Moi, à l’époque, je ne gagnais pas. Je n’ai pas beaucoup de sous sur le compte et j’ai payé le repas dans les 150 balles. Pour moi, c’était vraiment un budget. J’ai pris entrée, plat, dessert, café. J’ai traîné dans le resto de l’ouverture jusqu’à presque la fermeture.

Puis à un moment donné, j’ai dit au serveur :

« Monsieur Belmondo, il ne vient pas le dimanche midi ».

Si, très souvent. Mais il était là dimanche dernier.

Je dis : « là aujourd’hui ? »

Ah, on ne peut pas vous dire.

Je dis : « d’accord ».

On va attendre, il n’est pas venu. Puis, après, il y a plein de gens qui m’ont dit : « ouais, je vais te le présenter, c’est un bon ami à moi », puis qui ne me l’ont jamais présenté. Mais il y a plein de gens qui m’ont dit qu’ils allaient me présenter Van Damme ou plein de gens. En fin de compte, quand je demande à Van Damme : « tu connais untel ? Non ». D’accord, OK. Après voilà, c’est comme ça.

Franck : C’est le jeu.

Aton : C’est le jeu. Mais je dis qu’il est là. C’est ma façon de voir et je me dis qu’il veille sur le milieu du cinéma. Puis, peut-être que c’est un ange gardien maintenant qui m’aidera. Peut-être qu’il faut que je sois à l’écoute d’une petite voix de Belmondo, de Bébel qui dit à un moment donné de faire peut-être ce choix-là plus qu’un autre et puis d’y mettre beaucoup d’énergies, parce que ce sera peut-être le bon truc. Puis, à moi de rester moi-même, comme lui est resté lui-même tout au long de sa vie.

Franck : Moi, je sais que tu apprécies justement particulièrement en plus de Jean-Paul Belmondo, Sylvester Stallone, ces deux grands acteurs. Surtout ce qu’on peut noter, dans les années 80 à 90, les films, ils racontaient l’évolution d’un héros. Ils passaient par diverses difficultés pour arriver à la fin à transcender cette difficulté. Mais il y avait vraiment tout un parcours. C’est un héros qui se construisait dans la difficulté. Aujourd’hui, ce qu’on peut voir dans les héros, un peu les films de superhéros, ils sont quasiment tout de suite incroyables. Donc, on dirait que maintenant, la difficulté est éludée au profit du spectacle. C’est ce que j’ai pu remarquer. Aujourd’hui, tout va plus vite. D’ailleurs, je reprends avec plus de facilité, je reprends un extrait de ton livre où il y a écrit : « Nous ne croyons pas un instant à cette sélection commune. C’est déjà assez compliqué comme ça, avec une nouvelle génération de jeunes qui n’ont pas fait le service militaire, qui vivent dans le fantasme du jeu vidéo ou de l’airsoft, et dont le monde virtuel s’effondre quand ils sont confrontés à la réalité du terrain en arrivant en gendarmerie. » C’est une sorte de réalité versus le fantasme. Qu’est-ce que tu penses de ce constat ?

Aton : Je maintiens ce qu’on a écrit dans le livre. Jean-Luc et moi, c’était commun accord. C’est vraiment ce que je pense. Je pense que oui, le chemin, la difficulté pour arriver à son objectif, on met ça de côté au bénéfice de la réussite tout de suite, la télé-réalité où on met des gens dans un château tout de suite, dans des belles villas. On les sort de leur contexte pour les mettre dans un truc qui n’est pas de leur… Ils n’ont même pas la capacité pour certains de prendre la mesure. En fait, on les met tout de suite en situation que vous avez réussi et on présente sur les réseaux sociaux ou à la télé une réussite facile.

Mais ces réussites faciles, elles durent combien de temps ? Il y a plein de reportages aussi des gens de la téléréalité dans leur déchéance après. Stallone, Schwarzenegger, Belmondo, Depardieu, même si Depardieu c’est compliqué, il a un parcours très compliqué avec la perte de son fils et tout ça, mais ce sont des gens qui ont mis très longtemps, qui ont dû se battre pour réussir et qui ont maintenu en fait, et ils sortent du lot. Ce sont des gens qui sont vraiment atypiques.

La réussite sourit aux audacieux, pas aux gens à qui on l’a offert. Les gens qui gagnent au loto, je suis très curieux de savoir. Il faut être intelligent pour gérer plusieurs centaines de millions d’euros, de dizaines de millions d’euros. Il faut garder la tête froide. Quand on a construit un empire, on sait ce qu’il vaut, on connaît les menaces, on connait les risques, on fait une évaluation de tout ça et on le préserve. C’est pour ça que ça dure dans le temps.

Moi, si on me donnait l’occasion d’avoir une réussite comme ça tout de suite ou même de gagner au loto actuellement, je crois que ce serait plutôt un handicap. Je préfère construire à mon rythme de moi-même, bâtir les choses et arriver à ma réussite. C’est vrai qu’il ne faut pas que les jeunes croient à ce qu’on leur montre à la télé ou sur les réseaux sociaux. Il n’y a pas de réussite facile. Il y a des opportunités qui sont à créer, qui sont à saisir. Parfois, il y a des moments qui sont plus simples que d’autres, mais quand même, dans la globalité, atteindre son objectif n’est jamais simple.

Franck : Avant de conclure parce qu’on va arriver quand même à la fin de cet entretien, je remarque que c’est la seule photo que tu as choisi de garder dans tes mains que tu n’as pas rendu. Est-ce que c’est un signe ?

Aton : Non, mais c’est un peu l’avenir. Belmondo, malgré qu’il soit décédé, pour moi, ça reste là. C’est un ange gardien qui m’aide. Alors moi et d’autres.

Franck : C’est un exemple.

Aton : Mais c’est un exemple. Mais maintenant, l’erreur que j’ai pu faire, j’ai quand même le regret de ne pas avoir rencontré Jean-Paul Belmondo et ne pas lui avoir serré la main, échanger un regard et dire merci. Je ne ferai pas la même erreur avec Stallone. J’ai rencontré Jean-Claude Van Damme déjà. J’ai pu lui dire à quel point j’ai été heureux de le rencontrer et lui dire que grâce à lui, j’ai fait des bonnes choses et à cause de lui, j’ai fait des mauvaises choses. Je lui ai expliqué pourquoi, il est très curieux, d’ailleurs. Mais, je vais le rencontrer. Stallone, je vais le rencontrer pour lui dire merci.

Franck : Juste avant de conclure, je voudrais que tu me racontes quelque chose. Parce qu’avant de préparer cette interview, j’ai l’habitude, je le dis souvent sur ma chaîne YouTube, je vise l’excellence. Quand je dis ça, ce n’est pas juste me la raconter me dire que je veux être excellent. C’est parce que je pense que le futur, c’est l’excellence, c’est la qualité. C’est ce qui fait votre réelle différence. Je pense même que la qualité, c’est le seul business plan qui fonctionne.

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Quand j’ai travaillé cette interview, quand tu m’as dit oui pour faire l’interview, j’étais content. Donc déjà, j’ai lu le livre parce que c’est le moindre respect de recevoir un invité de lire son livre. J’ai regardé énormément de vidéos de toi sur Internet. D’ailleurs, mon fils m’a dit : Papa, le monsieur sur la couverture, c’est le monsieur que tu regardes toujours à la télé parce que je regarde YouTube sur la télé. Je dis oui, c’est le même. Ah ouais, il trouvait ça bizarre que tu sois ici et en même temps à la télé. Mais, bref, il a 5 ans. Je voudrais que tu me dises quelque chose qui t’est arrivé, mais que tu n’as jamais raconté ailleurs.

Aton : Alors tu sais, avec toutes les interviews que j’ai pu faire, si je n’ai pas raconté certaines choses, c’est parce que justement, ça ne doit pas être raconté. Quand on parle de prise de risque, j’ai raconté sur une conférence parce que c’était un peu un huis clos, quelque chose qui m’est arrivé il n’y a pas tellement longtemps où j’ai pris un risque, mais parce que j’ai évalué la situation. En fait, j’ai fait une pseudo-interpellation. Je suis civil maintenant.

Ce qui s’est passé pour remettre dans le contexte, j’étais à Metz avec des amis. On se rendait à un parc de loisirs et on avait deux voitures. Mon ami conduisait sa voiture. Il avait sa femme et il avait ma femme et sa fille dans la voiture. Il roulait sur une petite autoroute à deux fois deux voies. Moi, j’étais à l’arrière avec tout le reste des enfants.

Puis, on se suivait en voiture et à un moment donné, il s’apprête à doubler une voiture où il y avait un gars assez costaud, qui s’est mouché et qui a jeté son mouchoir par la fenêtre. Déjà, on ne jette pas par la fenêtre. Moi, je n’aime pas. Il le fait et ça tombe. Pas de bol, le mouchoir tombe sur le pare-brise et mon pote s’arrête. Je le vois mettre un coup de volant comme ça. Donc, il arrive à la hauteur du gars et lui fait comprendre et dit : « ça ne va pas ou quoi ? » Le gars a une mauvaise réaction. Mon pote continue de le doubler. Le gars le redouble. Il lui fait une queue de poisson et il freine. Mon pote est sympa, mais il ne faut pas trop le titiller, il le redouble. Puis, le gars lui fait signe, on sort et on va se la mettre.

Je connais mon pote, je sais qu’il a le sang chaud et je me dis, mais là, c’est ridicule. Mais c’est vraiment ridicule, le truc de merde. Je me dis en ce moment : plus les gens sont très à cran, ils sont électriques et tout ça. Je me dis, mais pour un truc comme ça, comment ça va finir ? En même temps, mon pote sort. S’il en vient aux mains quelque part, je lui donne presque raison. C’est ridicule. Mais à un moment donné, putain, il faut réagir. Moi, je suis très zen par contre. Je suis à l’arrière. Je regarde la situation et je dis, mais qu’est-ce que je fais ? Je les suis, ils sortent, ils se garent.

Et là, je vois mon pote sortir bien déterminé, et le gars sortir bien déterminé aussi. Ils commencent à se mettre en garde les deux. Je dis à mon fils : « prends ton portable et filme au cas où… » Moi, je sais ce que je vais faire. Et en fait, j’arrive derrière le gars et je l’étrangle et je l’amène au sol. Il est très surpris. Je n’avais rien perdu des années de pratique. Je le mets au sol et là, j’arme le poing et je lui dis sur un ton très calme, je dis mauvaise pioche. C’est une mauvaise pioche, mec. Ne joue pas au con parce que si tu joues au con… Je dis à mon pote : « tu vas te calmer ».

Ce n’est pas bien ce que je fais. Ce n’est pas bien. Mais je dis pourquoi je le fais et comment je l’ai fait. Alors, je ne dis pas qu’il faut sortir et en venir aux mains, justement. J’ai fait ça parce que j’avais une crainte, en fait deux craintes. C’était que mon pote prenne un mauvais coup ou que le gars sorte une lame et le plante, parce que maintenant, ça se règle comme ça. J’avais peur que mon pote lui mette un coup. Alors, je m’en foutais un peu de ce mec-là. Je ne le connaissais pas, mais bon. S’il faut encore une fois, ce mec-là, ce n’est pas le mauvais bourre. Mais, dans cette situation-là, c’est un méchant con et je n’avais pas envie que mon pote la smatte, que le gars soit blessé et qu’il aille en taule. Donc, j’ai décidé de faire ça, de faire de l’usage de la force.

Et c’était il y a deux mois de ça à peine. Je l’ai amené au sol et je l’ai menacé. Je lui ai dit : « tu vas te lever. Si tu te lèves et tu fais le moindre truc, je t’explose la gueule. » Ce n’est pas, je n’aime pas être dans ce domaine-là, d’être dans ce truc-là, parce que s’il s’était levé, s’il avait joué, j’aurais été violent. Je n’aime pas violent. Pour moi, la violence, elle est déraisonnée. L’usage de la force est raisonné. Je suis plutôt usage de la force. Mais, assumer les conséquences.

En ce moment, il y a des voitures qui passaient, je me suis dit que je commence à être connu. Si on me voit le mec par terre, moi comme ça dessus, mon pote à côté, on va dire : il fait quoi, ce mec. Il ne se maîtrise pas. En fait, c’est une maîtrise que j’ai eue de moi-même. Je n’ai pas frappé, il s’est relevé, il a dit pardon. Je ne lui demandais même pas. Je pense qu’il a compris. Je dis c’est ridicule, c’est ridicule. Il dit : « pardon, j’ai merdé ». Il est monté dans sa voiture. Mon pote était encore à cran. J’ai dit calme-toi. Vous imaginez ce que ça a été. Je n’ai pas raconté, j’ai hésité.

Ma première idée, c’était de le raconter sur les réseaux, un peu à chaud pour dire les gars, arrêtez, ne faites pas les cons. Voilà où on peut en venir. Après, je me suis dit que pour mon image, ce n’est pas bon. Mais comme là, tu me demandes quelque chose que je n’ai pas raconté, j’estime qu’il y a une manière de le raconter. Mais ce qui aurait pu être filmé, c’est moi comme ça sur un mec au sol.

Franck : Informations tronquées.

Aton : Si on avait filmé ça et balancé ça sur les réseaux sociaux, qu’est-ce qu’en on aurait tiré ? Là, quelque part, ce n’est pas sorti. Si maintenant ça sortait ou si le gars dit : « ouais, c’est moi, machin ». J’ai expliqué pourquoi je l’ai pris et je l’ai mis au sol. Alors c’est un étranglement, attention, c’est une amenée au sol. Ce n’est pas un étranglement. Quand on veut étrangler, on m’avait posé la question à un moment donné sur un étranglement. Quand on veut étrangler quelqu’un, si je veux étrangler quelqu’un, je l’étrangle. Si je veux le tuer en étranglement, je peux le tuer en étranglement. Si je veux l’amener au sol par un étranglement, c’est une amenée au sol. Et là, j’ai fait une amenée au sol. Et là, tout mon staff disait : « non, tu ne racontes surtout pas. On t’a exclu. On verra derrière si tu m’apporteras des oranges. » Mais moi, je garde le sang pas chaud, mais réactif. Je reste réactif.

Franck : Écoute Philippe, je vais te demander de me faire confiance. Est-ce que tu peux me faire confiance quelques secondes ?

Aton : Ouais, la confiance peut se donner d’emblée.

Franck : Je vais demander juste de tendre ta main et de fermer les yeux et de refermer ta main.

Tu peux ouvrir ta main. Tu sais ce que c’est ?

Aton : Non.

Franck à 14 ans : C’est l’œil d’Agamotto de Docteur Strange. À l’intérieur, il y a la pierre du temps qui permet de remonter 30 ans en arrière. Qu’est-ce que tu dirais au toi d’il y a 30 ans ?

Aton : Qu’est-ce que je dirais au moi d’il y a 30 ans ? Je lui dirais, ça va être compliqué, voire très dur, mais tu resteras sur le chemin que tu t’es fixé jusqu’à 30 ans au moins. Dans 30 ans, certains ne croiront pas en toi. Évite de les écouter. Focalise sur ceux qui croient en toi et ceux qui parfois ne croient pas, mais juste en tes capacités parce qu’en fait, ils vont te donner les bons conseils pour que tu sois au niveau. Donc, écoute les critiques constructives. Écoute ceux qui te motivent et n’écoute pas les rageux, les jaloux qui diront que tu n’es rien et que tu ne mérites même pas ta place sur terre. Tu la mérites, tu seras utile à des moments, tu te poseras des questions sur ton utilité, mais ne doute pas.

On te fera te poser des questions sur ton utilité, mais ne remet pas en question. Vois les actes, concentre-toi sur tes actes. Puis, kiffe. Profite des moments qui seront offerts à toi, profite pleinement. N’aie pas de regret à profiter, n’aie pas de scrupules à profiter parce que les moments sont courts. Tu auras des amis, tu vas en perdre. C’est la vie, c’est comme ça, donc profite de chaque instant et continue à travailler et les rêves que tu as actuellement devraient se réaliser. Donc, continue comme ça, tu es sur la bonne voie. Voilà ce que je me dirai.

Franck : Superbe. En tous les cas, merci beaucoup Aton d’avoir pris du temps pour répondre à mes questions parce que je sais que tu es quelqu’un d’occuper. D’ailleurs, on passe le bonjour à Angélique parce qu’elle a aussi contribué à cet entretien, ton assistante. Je vais te laisser le mot de la fin. J’ai l’habitude de laisser le mot de la fin. Tu dis ce que tu veux pour ce mot de la fin.

Aton : Ce que je veux, déjà merci. Merci à toi pour l’invitation. Merci à toute cette organisation, ce professionnalisme. Merci pour tes questions qui ont été assez atypiques. Merci pour l’intérêt que tu as apporté au livre et à ma personne. Ce qui a fait que les questions étaient pertinentes et intéressantes pour moi à vivre. Je n’ai pas vu le temps passer.

Puis maintenant, le mot de la fin. On vit une période qui est un peu compliquée. J’ai envie de dire que moi, je suis très optimiste pour la suite. Comme tu disais tout à l’heure, à juste titre, c’est l’excellence qui va vaincre. Donc, on passera par une période très compliquée de remise en question et je pense que c’est tout à chacun de se remettre individuellement en question et de ne pas rejeter la faute sur la société, le gouvernement, enfin tout son environnement. Mais de se dire qu’en fait, on a tous un rôle à jouer dans cette société et quelle société on veut pour demain et quel rôle individuellement, on va y jouer et de le jouer dès maintenant. C’est aussi bien sur l’écologie que sur la manière de se comporter avec les autres.

J’ajouterai, je le dis souvent, mais je martèle avec ça, c’est la bienveillance et la confiance, parfois d’emblée. Tout à l’heure tu m’as demandé est-ce que tu as confiance en moi, je t’ai dit oui, j’ai tendance à faire confiance d’emblée. Par contre, je pardonne une fois. L’erreur est humaine, je la pardonne une fois. Mais j’estime que quand on fait une deuxième fois la même erreur, c’est qu’on a une volonté de malveillance. On peut se tromper une première fois, c’est l’erreur, mais jamais deux. Donc, je dirais aux gens de faire un peu plus confiance en leurs semblables, de se faire un peu plus confiance en eux et de prendre un peu leur rôle un peu plus à cœur dans ce jeu qui est collectif de la société.

Franck : Je vais compléter tes propos pour terminer cet entretien. Il y a un célèbre Youtubeur. Je vous laisserai deviner. Vous marquez dans les commentaires si vous arrivez à trouver qui sait. Il dit :

« Une fois c’est une coïncidence, deux fois c’est une occurrence et trois fois c’est une récurrence. »

Aton : J’ai une autre citation, peut-être mieux encore que celle-ci :

« Ne soyez pas la énième copie d’une énième et d’une énième copie, sous peine de se transformer en photocopieur. »

Si vous souhaitez voir l’intégralité de l’interview d’Aton, cliquez sur l’image juste en dessous :

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