1999, date de sortie d’un film qui va révolutionner le cinéma. Mais pas seulement.
Très fortement inspiré par la culture des Comics et des mangas, les frères Wachowsky construisent un récit d’émancipation et de libération : Matrix.
Deux suites plus tard, la saga engrange plus d’un milliard de dollars de recettes avec des récompenses en pagaille. À y regarder de plus près, le scénario est simple à comprendre, mais il comporte beaucoup de messages cachés plus complexes à définir. Ce qui alimente les débats et pose les bases d’un mythe, des légendes tout autour de ce film. Tout est réuni pour créer une grande marque.
Ce classique du genre marque en profondeur la pop culture. C’est un film culte où tout est mis en œuvre pour générer une mythologie autour de ce récit. Plus on parle de votre marque, plus on l’achète. Pour aller encore plus loin dans l’analyse de ce film, nous regarderons en détail comment il a assemblé diverses briques pour créer quelque chose d’unique. Pourquoi il a séduit autant de personnes ?
On va entrer dans la matrice pour comprendre Matrix. Parce qu’au fond, ce film pose une question existentielle qui traverse toutes les générations et s’adresse à tous, êtes-vous le héros de votre propre vie ?
UNE HISTOIRE DE BRIQUES
Matrix est un ovni.
On pourrait croire que c’est quelque chose d’unique. Mais comme on l’a vu dans bons nombres de mes articles dédiés à l’image de marque, la créativité et l’innovation, cette dernière arrive souvent suite à l’assemblage de divers éléments. Pour approfondir le sujet de l’innovation, je vous invite à regarder l’entretien que j’ai eu avec Cyril de Sousa Cardoso auteur spécialiste du sujet sur ma chaîne YouTube.
Dans cette partie, on va donc déstructurer Matrix pour apercevoir les diverses briques assemblées.
Commençons par le scénario. Matrix est basé sur un scénario existentiel qui a déjà fait ses preuves. Un personnage qui semble commun devient l’élu pour abattre un système qui oppresse le peuple. C’est une critique de la société de consommation s’appuyant sur la théorie de l’élu. Ce scénario alimente le fantasme que nous sommes utilisés. C’est en phase avec l’année de sortie du film, 1999. Les médias ne cessent de parler du bug de l’an 2000. Comme les ordinateurs n’étaient pas conçus pour afficher ce chiffre, beaucoup pensaient qu’un crash mondial informatique allait arriver.
Bien évidemment, comme 99 % des complots, ce n’est pas arrivé.
Je fais un petit aparté. Si vous vous intéressez au phénomène du complotisme, je vous invite à lire l’article l’hystérie du COVID-19. Il y a toute une partie dédiée à ce sujet. Il est très intéressant de voir comment les complots sont utilisés pour manipuler les masses et exciter les opinions.
1999 c’est également les prémices d’Internet. Le monde est autant enthousiasmé qu’effrayé par l’arrivée de cette nouvelle technologie que beaucoup ne comprennent pas. La matrice qui est une prison virtuelle pour maintenir sous contrôle peut représenter un futur hypothétique. À vrai dire comme toutes les innovations, ce type de scénario a déjà été vu auparavant.
En juin 1990, sort le film Total Recall réalisé par le célèbre réalisateur Paul Verhoeven. Bien que le scénario puisse sembler éloigné de Matrix, on y retrouve les mêmes ressorts. Un héros qui se révèle être l’élu et qui va libérer un peuple soumis à l’oppression. Douglas Quaid, (interprété par Arnold Schwarzenegger) suis le même chemin que Neo, interprété par Keanu Reeves dans Matrix. Les deux personnages ont une vie tout à fait normale jusqu’au moment où un événement va les éveiller. Ils prennent conscience de leur statut particulier et deviennent des leaders. Matrix possède différents scénarios à tiroirs. On peut le lire simplement comme un combat du bien contre les machines ou comme une critique de la société. Les deux films ont cette particularité de brouiller les pistes, d’être peut-être un rêve dans le rêve. La matrice est un programme qui permet de faire croire aux être humains qu’ils vivent une vie normale alors qu’ils sont utilisés comme des piles par les machines. Bon pour aller plus loin on pourrait même dire que ce qu’ils pensent être leur vraie vie en dehors de la matrice est conçu dans la matrice. Oui, je sais : c’est à se faire des nœuds au cerveau. On y reviendra plus tard parce que c’est intéressant de se pencher sur ce point. Le héros de Total Recall rêve régulièrement d’une autre vie, sur Mars. Il finit par se payer l’implantation de souvenirs factices dans une agence appelée Total Recall. Cette expérience révélera sa vraie personnalité : c’est un agent secret. Sans rentrer dans tous les détails de ce scénario, là encore c’est un rêve dans le rêve. Un scénario imbriqué de plusieurs histoires.
Matrix a été reconnu unanimement comme un film qui a marqué l’industrie cinématographique grâce à ses effets spéciaux. Il a d’ailleurs reçu un Oscar pour ses effets numériques. Le plus connu est un effet qui consiste à figer l’action pour faire tourner la caméra autour des protagonistes. Celui-ci fut nommé le bullet time. Pour le réaliser, il faut aligner des dizaines d’appareils photo numériques tout autour de la scène puis, les déclencher simultanément. Chaque image permettra d’assembler un angle de vue légèrement différent. Une fois montées, cela donne l’illusion de tourner autour d’une scène alors que le temps s’est arrêté. Les différentes scènes de Matrix qui utilisent ce procédé ont été maintes fois copiées, allant même jusqu’à l’overdose. C’est un excellent exemple de ce dont je vous parle souvent :
La vision est plus importante que le chemin.
La vision, c’est votre objectif, le chemin, les outils pour atteindre celui-ci. En utilisant uniquement le procédé, le bullet time, sans avoir la vision, l’objectif du scénario du réalisateur, cette technique ne sert à rien. Ses principes sont maintes fois enseignés dans ce que j’appelle le marketing de clones : reproduire des stratégies qui semblent fonctionner chez la concurrence à laquelle l’on ne souhaite pas ressembler.
Edward Muybridge photographe britannique spécialiste de la décomposition du mouvement est le créateur de cette technique depuis 1878. Là encore, le film Matrix utilise quelque chose qui a déjà fait ses preuves. Le storytelling du film est très bien conçu. La définition même de la matrice, c’est un élément qui fournit un appui ou une structure et qui sert à entourer à reproduire ou à construire. Matrix est un film qui utilise une matrice pour son scénario ainsi que pour les divers éléments qui le constituent, mais qui est également une critique de la matrice en elle-même.
Très fort les frères Wachowski même si depuis ils sont devenus les sœurs Wachowski ! Oui je sais, il faut suivre.
Le synopsis du film est conçu selon l’allégorie de la caverne exposée par Platon. Pour faire simple, celle-ci explique qu’un peuple est enchaîné dans une demeure souterraine en opposition à un monde plus haut et plus clément. On a tous ce sentiment enfoui que nous méritons mieux. Le scénario du film vient le nourrir. De plus, Thomas Anderson, c’est le nom et le prénom de Neo, est un personnage tout à fait lambda, qui pense être différent. Morpheus vient lui révéler qu’il a raison et qu’il ne vit pas sa propre vie. Il lui propose de rester dans un monde qui se répète à l’infini ou d’aller vers un Nouveau Monde qui va le transcender. Neo choisit la seconde option. Évidemment ce monde va le transcender, mais avant cela, il devra parcourir un chemin semé d’embûches avant d’y arriver.
Mais vlatipa que ça me rappelle quelque chose ? Quand je regarde une pub du téléachat et qu’on propose un aspirateur qui aspire mieux que tous les autres aspirateurs du monde, est-ce que cela va vraiment changer ma vie ? Évidemment cette théorie de l’élu est largement utilisée dans diverses stratégies marketing. Vous êtes conscients de votre problème. Une entreprise vous propose une solution à ce problème grâce à son produit. Grâce à celui-ci vous devenez une nouvelle personne. D’ailleurs, on peut voir sur de nombreux posts Internet que la métaphore utilisée dans Matrix, avec le passage ou Morpheus propose la pilule rouge et la pilule bleue à Néo, est maintes fois utilisée. Allant même jusqu’à l’overdose comme l’effet bullet time, #marketingdeclone.
T’AS LE LOOK COCO !
Matrix, c’est le cocktail parfait avec pour ingrédient, une dose de Comics, un soupçon de mangas et une grosse pincée de jeu vidéo. Mais c’est surtout un style avec une empreinte indélébile :
la teinte de l’image, plutôt verte dans la matrice et plutôt bleue dans le monde réel,
le style de plan, toujours un peu bord cadre abusant des plans larges déformés,
les looks particuliers, les lunettes de soleil, habillés tout en noir, les tenues en cuir,
mais aussi et peut-être même surtout, les chorégraphies de combat.
Yuen Woo-ping est un réalisateur chinois connu pour les chorégraphies qu’il a organisées notamment dans la trilogie « Tiger Cage » et aussi dans le film « Tai-Chi Master ». Les combats deviennent épiques avec des chorégraphies mêlant le possible à l’impossible pour donner un style encore plus particulier. Les frères Wachowski utiliseront beaucoup le ralenti pour sublimer leurs personnages et leurs scènes d’action. Ce type de ralenti a influencé tout un pan de l’industrie du jeu vidéo. Assassin’s Creed en est un digne successeur. Bah ! Ça tombe bien parce que j’ai fait un article entièrement dédié à ce sujet. Que vous aimiez ou non les jeux vidéo, je vous invite à lire cet ouvrage pour comprendre les moindres détails du succès incroyable de cette saga.
Tout ce style visuel a été maintes fois copié par la suite, lançant un courant de films tous inspirés à la base de Matrix. Les dialogues du film ont été travaillés pour devenir des répliques cultes. Si vous avez déjà vu le film, il y a certainement quelques phrases qui vous ont marquées. Toutes ces citations sont maintenant reprises à foison sur les réseaux sociaux.
L’agent Smith retient prisonnier Morpheus et ne peut s’empêcher de lui avouer son dégoût pour la race humaine, la comparant à un virus qui pollue la planète terre.
Ce dialogue était précurseur. Il a depuis été réutilisé par les altermondialistes et les écologistes.
Ou encore celui de Morpheus à Neo qui a fait les beaux jours de toutes les publications sans vie de développement personnel que l’on retrouve à foison sur les réseaux sociaux.
Dans mes article, je vous parle souvent d’être raccord dans votre message. Toute votre stratégie de communication doit être huilée comme une horlogerie suisse. Si un grain de sable vient s’y glisser, cela enraye la machine. D’où l’importance de faire attention au moindre détail parce que le diable est dans les détails et les détails font le diable.
Les réalisateurs de Matrix l’ont bien compris. Même la musique est raccord avec tout l’univers du film. Sur la bande originale du film, on retrouve le groupe Rage Against The Machine avec des morceaux comme « Wake-up », « réveille-toi » en français. Le choix de la musique peut paraître anodin, mais ici, il est très pertinent pour appuyer le fond du scénario et le style du film.
Si vous êtes abonné à ma chaîne YouTube et si vous faites bien attention et que vous tendez l’oreille, vous entendrez souvent des morceaux qui sont en rapport avec mes propos.
Pour votre image de marque, il s’agit ici de soigner le fond, la forme et le style.
- Le fond, c’est travailler son sujet. Dans le cas de Matrix, le scénario est très bien ficelé pour donner quelque chose d’unique, même s’il peut paraître simpliste au premier abord. Pour mes articles, je mets plusieurs jours à écrire le contenu. Je me documente énormément pour donner le maximum de qualité à mon script. Je lis des articles, je regarde des vidéos, je lis des livres à propos du sujet concerné.
- Deuxièmement la forme. C’est mettre en valeur le fond. Mes articles sont réalisés par un graphiste. Il utilise des outils professionnels. Cela professionnalise la réalisation de cet ouvrage.
- Troisième point, le style. Faire en sorte que le tout soit reconnaissable au premier coup d’œil. On vient d’en parler juste avant pour Matrix. Pour ce qui est de article, j’ai choisi une charte graphique minimaliste sur fond noir avec un style de texte simple, épuré. Si vous possédez plusieurs de mes articles, ils ont tous un style similaire, mais qui permet de me différencier.
Mais le fond, la forme, et le style sont inutiles si vous n’avez pas crée votre légende.
MYTHES ET LÉGENDES
Matrix est une lecture du monde à travers le prisme du complot qui ne fera que gagner en popularité au cours des années succèdent à sa sortie.
Tellement populaire que Matrix 4 va voir le jour, plus de 18 ans après le dernier film de la saga. Ce film suscite les discussions et surtout les théories. Keanu Reeves alias Neo est sujet à tous les fantasmes. De nombreux fans comparent les photos de l’acteur pour se rendre compte qu’il ne vieillit pas et qu’il aurait été présent au siècle dernier. Ce sont des ouf les mecs ! Keanu Reeves a été l’acteur principal d’une autre saga, John Wick, avec à ce jour quatre films au compteur. John Wick est un ancien tueur à gages qui reprend du service pour se venger. De nombreux fans pensent que John Wick et Neo sont liés. Ils font le parallèle entre différentes scènes des deux sagas établissant la possibilité que John Wick soit Neo. Tous ces fantasmes permettent de créer la légende Matrix, légende qui s’appuie sur un futur dystopique qui trouve une résonance en cette fin de XXe siècle marqué par les crises, l’arrivée du Web et les attentats.
N’oublions pas que seulement deux ans après la sortie du premier film, les tours du World Trade Center ont été détruites suite aux attentats du 11 septembre 2001. L’histoire de Neo propose une métaphore à toutes les thèses affirmant que la réalité nous est cachée. Elle ne sera révélée qu’aux élus qui auront fait le choix d’affronter la réalité. C’est le mythe de « nous savons et les autres dorment et ne savent pas ». Vous êtes donc différent parce que vous, vous avez choisi de savoir. Nous avons tous ce sentiment au fond de nous, d’être différents. Même si dans la réalité, nous sommes tous comme les autres. Le film flatte notre ego tout comme un produit va flatter l’égo de vos clients parce qu’ils se sentiront différent une fois qu’ils l’auront acquis. Il est toujours intéressant de voir comment nous pensons avoir acquis les capacités d’un produit juste parce que nous l’avons acheté. Si on prend l’exemple de la paire de baskets, on l’achète en pensant qu’on va devenir un super coureur. Une fois arrivée chez soi, la paire est rangée dans le placard et on n’y touche plus. Mais on est certain de savoir un peu mieux courir parce qu’on a acheté les chaussures qu’il nous faut. La force de Matrix est d’avoir su construire sa propre légende. Est-ce que l’histoire du jeune garçon qui a bâti sa marque d’ordinateur dans son garage est vrai ? Ça, on ne le saura jamais mais l’histoire participe à la création d’une marque qui pèse aujourd’hui plus de 2000 milliards de dollars de capitalisation boursière : Apple. Est-ce que l’histoire du jeune joggeur, qui a eu un éclair de génie, pendant la pratique de son sport favori, pour mettre sur le marché des chaussures d’une très grande qualité qui soient importées du Japon et vendues à un prix compétitif aux États-Unis est vrai ? Ça aussi, on ne le saura jamais mais cela n’a pas empêché à Nike de devenir la première marque de baskets au monde.
Une marque sans storytelling et sans légende, c’est comme un slip sans élastique, ça finira par tomber. Toute la prophétie de Matrix se concentre sur trois personnages clés : l’élu, Néo, le mentor, Morpheus, et un ennemi machiavélique qui est …
CONNAÎTRE SON ENNEMI
Alfred Hitchcock disait « meilleur est le méchant, meilleur est le film. ».
Et dans Matrix, le méchant est vraiment très très méchant. Il est incarné par l’agent Smith qui est un programme de la matrice pour chasser les personnes qui veulent s’en émanciper.
L’agent Smith est l’exact opposé de Neo. C’est son Némésis. L’un n’existe pas sans l’autre. Ce double numérique est l’algorithme incarné par un personnage cauchemardesque. Il a tous les pouvoirs. Il est quasiment indestructible. L’agent Smith n’est pas seul, il a des sbires qui lui ressemblent fortement mais c’est le seul à être nommé et le seul avoir des particularités. C’est un méchant identifiable. Les autres méchants ne sont que des ersatz de l’agence Smith, sans son charisme et ses particularités. Dans les suites du premier opus, il aura droit à son propre arc narratif, certaines théories allant même jusqu’à dire que c’est lui le vrai élu.
Ah oui ! J’aurais pu le mettre dans le chapitre précédent ça. Plus fort sera le méchant et plus la quête du héros aura de l’importance. C’est exactement pareil pour votre marque. D’où l’importance de définir son ennemi. Toutes les grandes marques ont nommé leur ennemi : Apple contre Samsung, Nike contre Adidas, McDonald’s contre Burger King. Ce type d’opposition, vous le retrouverez dans tout style de marché. Si vous n’avez pas d’ennemi, c’est que vous n’avez pas de marque. Cela ne veut pas dire que vous voulez chercher à le détruire comme l’agent Smith veut détruire Néo et inversement. Cela vous permet plutôt d’affirmer les valeurs de votre marque. Ce que fait le concurrent, c’est très bien, mais nous ce que nous proposons, c’est autre chose. Un Némésis est l’exact opposé des valeurs et croyances de votre personnage principal. Pensez-y au moment de votre positionnement. Si vous êtes un outsider, vous avez l’avantage de séduire toutes les personnes qui ne sont pas intéressées par le leader et qui ne sont pas encore représentées par une autre marque.
PLUS + PLUS = MOINS
Bon ! Tout n’est pas parfait dans Matrix.
Il est important de se pencher sur les défauts pour ne pas les reproduire. Pour écrire cet article, j’ai regardé les trois films. Comment vous dire… Le premier opus passe crème. C’est une œuvre pionnière et il n’a pas pris une ride. Par contre, les deux suivants, c’est un autre délire. Le deuxième opus, Matrix Reloaded a bénéficié de deux fois plus de budget que son prédécesseur. Mais qui dit deux fois plus de budget ne veut pas forcément dire deux fois plus de qualité. Plus d’argent pour réaliser quelque chose c’est bien, mais bien utiliser cet argent c’est mieux. Les effets spéciaux utilisés dans le premier Matrix étaient précurseurs. Dans les deux suites, Matrix Reloaded, Matrix Revolutions, on arrive à une surenchère d’effets numériques qui nuit à la qualité du produit. Le combat avec l’agent Smith dans le second opus a très mal vieilli ou encore la baston finale avec encore l’agent Smith (oui, ça traîne en longueur) est limite caricaturale. Les effets spéciaux du premier étaient moins nombreux mais plus recherchés dans l’innovation. Ils étaient disséminés de manière à rendre le film équilibré. C’était bien dosé.
Ce n’est pas la première fois dans l’histoire du cinéma où les effets spéciaux peuvent nuire à des œuvres cultes. C’est le cas pour Star Wars ou de nombreux fans du film préfèrent les effets spéciaux ainsi que les costumes un peu grossiers de la première Saga (le latex, les maquettes) aux effets numériques de la seconde trilogie. Le scénario se complexifie à outrance en faisant appel à une multitude de nouveaux personnages qui sont pour la plupart très dispensables. Complexifier quelque chose ne veut pas dire lui donner de la qualité. Je pense même que c’est l’inverse. Il faut simplifier le produit. Comme le disait le grand philosophe, Philippe Etchebest : « Simplifie ta carte ou je te mets un bourre pif ».
Pour la suite de Matrix, les réalisateurs, euh … en fait les réalisatrices, ont complexifié le scénario là où il leur suffisait d’être simple et ont simplifiées l’intrigue là où il aurait fallu un peu plus de nuance. Le méchant, l’agent Smith, est l’incarnation des machines dans le premier opus. Mais il y a quelqu’un au-dessus qui tire les ficelles dont on ignore l’aspect. C’était un méchant impalpable globalement ce qui accentuait l’intérêt. Alors que dans la suite l’agent Smith devient le méchant principal. En gros, on dit c’est lui le méchant, c’est facile à reconnaître, vous n’avez pas besoin de vous fatiguer. L’imagination ne travaille pas. Le film devient même une caricature de lui-même en utilisant ou plutôt en abusant de tout ce qui avait fait sa spécificité. C’est plutôt amusant de l’observer avec le recul puisque Matrix était un film précurseur que tout le monde copiait pour ensuite devenir un film qui se copie lui-même en y perdant au passage, son âme. La fin du premier film se suffit à elle-même. Elle finit sur un scénario ouvert qui laisse libre cours à l’imagination. Alors que la fin du dernier opus de la saga, Matrix Revolutions, finit de manière beaucoup plus simple. Les gentils ont gagné. Les méchants ont perdu. La non-divulgation totale du scénario pour la fin de Matrix était un des éléments qui a permis de créer la légende du film.
D’autres réalisations l’ont utilisé par la suite, comme « Looper » de Rian Johnson avec Joseph Gordon Levitt et Bruce Willis ou encore « Inception » de Christopher Nolan avec Leonardo Di Caprio et Marion Cotillard. Si vous n’avez pas vu ces deux films, je vous invite à les regarder. Du point de vue marketing, c’est très fort puisque cela continue à faire parler après la sortie d’un film. On en parle sur les réseaux sociaux et des forums entiers sont dédiés à ce sujet.
Ce qui est certain, c’est qu’à vouloir trop en faire, le film en a été dénaturée. Lorsqu’un entrepreneur souhaite créer son premier produit, il a tendance à trop vouloir en faire. Tendre vers la simplification est beaucoup plus utile pour vous comme pour votre client. C’est plus facile à réaliser pour vous et c’est plus facile à comprendre et assimiler pour le client. Il y a un film qui a succombé à son envie de vouloir trop en faire, c’est « Justice League » de Zack Snyder. Tout un tas d’éléments scénaristiques ont été casés dans une durée très courte ce qui a contribué au naufrage du film. Si vous aimez les super-héros, que vous êtes un entrepreneur, lisez l’article que j’ai rédigé sur le Snyder’s Cut, il est très intéressant.
CONCLUSION
Un individu qui évolue dans un monde qu’il croit réel et qui en réalité ne l’est pas, est-il libre ?
En faisant de Matrix une œuvre unique, les réalisateurs nous amènent à nous questionner sur la réalité du monde présenté comme réel. Avec cette analyse, je cherche à vous faire vous poser des questions. J’évite les poncifs et les stratégies de copier/coller pour vous amener plus loin dans vos raisonnements.
Si aujourd’hui vous ne voyez qu’un style de méthode, est-ce que c’est celle-ci qui fonctionne réellement ? Ou bien est-ce celle-ci que l’on veut vous vendre absolument ? Je relève les copies d’ici une heure.
Plusieurs points importants sont à extraire de cette analyse :
- L’innovation n’est pas un événement qui surgit au hasard. C’est une succession d’événements qui amène à l’assemblage de différentes briques. Le bullet time, le scénario, le contexte du film … Ces éléments s’imbriquent pour créer quelque chose d’unique et d’innovant.
- Le fond, la forme et le style sont à prendre en compte dans l’élaboration de votre marque.
Le fond, c’est le travail du sujet. C’est souvent la face immergée de l’iceberg. Un sportif de haut niveau s’entraîne des mois et des mois pour une compétition où on ne le verra que quelques minutes dans sa discipline. Usain Bolt a enfilé des kilomètres et des kilomètres de course pour seulement moins de 10 secondes de course visibles.
La forme, c’est mettre en valeur votre fond. Aujourd’hui, sur YouTube on ne peut que constater que tout tend à une professionnalisation des réalisations. Filmer avec son smartphone, c’est possible pour une première vidéo, mais il va falloir vite passer à du matériel professionnel. De plus, si vous voulez être perçu de manière crédible, aujourd’hui, le message ne suffit plus. Notre société d’image nous contraint à en avoir une de qualité.
Le style, c’est faire en sorte que la forme et le fond, soit reconnaissable au premier coup d’œil. Il est également indispensable de travailler sur le storytelling de votre marque. Toutes les grandes marques ont su créer un mythe autour d’elle. Qu’il soit vrai ou non, l’important est qu’il comporte quelques éléments réels et vérifiables. Le reste appartient à la magie du storytelling.
- Simplifier à l’excès un produit est plus bénéfique que de le complexifier à outrance.
Quand vous allez dîner dans un restaurant, vous remarquerez que la carte est composée d’un nombre restreint de plats. Par contre, il suffit de faire un petit tour à la pizzeria du coin de Cergy pour vous rendre compte que vous avez la possibilité de choisir entre 34 pizzas différentes, 22 plats de pattes et 18 viandes. D’après vous lequel travaille son image de marque et son positionnement ?
- Il y a un autre point sous-jacent à cette analyse dont je n’ai pas parlé auparavant. La matrice est une sorte d’algorithme qui propose à l’être humain ce dont il a envie ou plutôt de ce que l’algorithme pense que l’être humain a envie. Plus la technologie avance et plus la soumission à l’intelligence artificielle nous conforte dans une manière de penser. Eli Pariser, militant internet, a créé le concept de bulle de filtre ou aussi appelé bulle de filtrage.
La bulle de filtre désigne le phénomène provoqué par l’accumulation d’algorithme de filtrage et de personnalisation sur Internet. Cet ensemble de filtres fait que chacun accède en ligne non pas à un espace commun, mais un espace qui lui est personnalisé empêchant des points de vue différents de se rencontrer, de se confronter et donc de se nourrir. Ce n’est pas parce que les réseaux sociaux vous montrent à longueur de temps les mêmes théories que celles-ci deviennent celles qui vous correspondent le plus. Il faut aller plus loin que les apparences auxquelles notre condition nous habitue.
Matrix est à ériger au Panthéon des films différents. Des films qui ont marqué l’industrie cinématographique. Un film qui nous parle d’un moule, qui est conçu dans un moule, pour nous faire sortir du moule, la matrice.
Parce qu’à force de devenir l’énième en copie d’une copie, on finit par se transformer en photocopieur.
Si vous souhaitez voir la vidéo qui retrace l’intégralité de cet article, cliquez sur l’image juste en dessous :